Les  Vosges  déc.1914 - mars 1915

 

 

 

1..La Vallée de Cernay

2..L’offensive Allemande dans la vallée de Munster

3..L’Hartmannswillerkopf

4..Les combats au Reichakerkopf

 

La Vallée de Cernay

 

Conformément aux directives données par le général commandant le 34e Corps d'Armée, la 66e division avait reçu l'ordre d'entreprendre, le 1 décembre 1914, une opération sur Aspach-le-Haut, en vue de rendre plus régulières les communications entre Thann et Belfort par la route Thann-Rodern-Seuntheim.

 

Après une préparation d'artillerie assez sérieuse, trois compagnies du 213e régiment d'infanterie avaient occupé Aspach-le-Haut, tandis qu'à gauche une compagnie du 15e bataillon de chasseurs, appuyée par une section de 65 de montagne, opérait une diversion dans la direction de Rinipach.

 

Le 2 décembre 1914

La 132e brigade de la 66e division attaquait sur la Tête-de-Faux, dans le but d'occuper ce sommet.

L'opération était menée par le 215e régiment d'infanterie, deux compagnies du 28e et cinq compagnies du 30e bataillon de chasseurs. Nos soldats enlevèrent à la baïonnette le sommet de la Tête-de-Faux, poursuivirent l'ennemi à plus de 300 mètres au-delà, mais furent arrêtés par de nouvelles organisations défensives.

Ils se retranchèrent alors et repoussèrent deux contre-attaques. Sur la droite, deux compagnies du 215e régiment d'infanterie enlevaient, pendant ce temps, la petite Tête-de-Faux, mais devaient ensuite. rétrograder sous le tir des mitrailleuses.

Toutes nos tentatives sur ce point échouèrent.

Seuls, les chasseurs purent maintenir leur occupation de la Tête-de-Faux

 

Lire les combats à la Tête de Faux en décembre 1914

 

Le 10 décembre

Le 34e Corps d'Armée devient le détachement d'Armée des Vosges, et reste sous le commandement de son chef, le général Putz.

Une opération sur Cernay est préparée par la 66edivision, tandis que la 57e division doit attaquer sur Aspach-le-Bas ; un bataillon du 359e régiment d'infanterie, se portant sur la gare d'Aspach, assurera la liaison entre les deux attaques.

A la 66e division, le 152e régiment d'infanterie se porte en avant avec six compagnies et atteint, après trois heures d’ efforts, la lisière nord-ouest de Steinbach ; le 15e bataillon de chasseurs se porte sur Uffholz;

Il est retardé dans sa marche par des chemins étroits et mauvais ; et, au débouché des bois, un feu violent l'accueille.

Il gagne à peine 300 mètres de terrain au-delà des lisières.

 

Patientez un peu pendant le téléchargement....Merci !!Le 28e bataillon de chasseurs, qui débouche à sa gauche, réussit à occuper la croupe qui domine, à l'ouest, Wattweiler.

Le bataillon du 359e, qui relie les attaques des deux divisions, parvient jusqu'à 150 mètres des tranchées défendant Aspach-le-Bas.

A la 57e division, l'action assez mal soutenue par l'artillerie, fait peu de progrès ; les troupes, en particulier les 371e régiment d'infanterie et 204e régiment d’artillerie, vaccinées récemment contre la fièvre typhoïde, (pour partir en Orient) sont en mauvais état physique.

 

Le lendemain

Par suite du brouillard qui empêche les réglages de l'artillerie, nous nous contentons, à la 66e division, de repousser des attaques, et, à la 57e, de préparer notre progression méthodique vers Aspach-le-Bas.

 

Les jours suivants

Les efforts de la 66e division sont principalement dirigés sur Steinbach, d'où partent les feux qui prennent en flanc nos unités débouchant des bois pour attaquer Cernay.

 

Le 28 décembre

La 4e compagnie du 152e régiment d'infanterie réussit à occuper, après une lutte particulièrement difficile, la plus grande partie du parc du château en ruines, au nord-ouest de Steinbach.

Le 30 décembre, des éléments du 152e d'infanterie pénètrent dans le village, mais l'incendie des maisons empêche leur progression.

 

Le 1e janvier

Ce  régiment s'empare de trois lignes de maisons fortifiées et des boyaux de communication qui les relient

 

Le 3 janvier, appuyé par un bataillon du 218e d'infanterie et par le 15e bataillon de chasseurs à pied, le 152e enlève Steinbach et s'y établit.

 

Mais la rigueur de la température va interrompre les opérations pendant plusieurs semaines. On s'organise, on installe les liaisons optiques et téléphoniques, on perfectionne les procédés de ravitaillement, et on améliore le plus possible l'installation matérielle des troupes.

 

 

L'OFFENSIVE ALLEMANDE DANS LA VALLÉE DE MUNSTER

 

L'idée directrice des opérations va être de tenir solidement le terrain entre la vallée de Cernay et la Suisse, et de progresser dans la vallée de Munster, en direction générale de Colmar. Afin que l'ennemi ne menace pas notre aile droite par la vallée de la Thur, il nous faut maintenir la possession de l'Hartmannswillerkopf, qui domine cette vallée.

 

Mais, le 19 février, l'ennemi nous devance dans nos opérations.

Dès le lever du jour, il bombarde violemment le Reichakerkopf et le col du Sattel, donnant l'impression d'une forte offensive remontant la vallée de la Fecht.

L'attaque d'infanterie ne tarde pas à se déclencher; à 8 heures, les Allemands prennent pied sur le Reichakerkopf. La lutte se poursuit, ardente, pendant toute la journée; la situation paraît si grave au commandant de la 47e division qu'il rappelle à lui ses réserves, alors au repos près de Gérardmer.

Ces unités mettront huit heures pour parvenir, très fatiguées, sur le terrain du combat, où elles seront engagées au fur et à mesure de leur arrivée.

 

Le 20 février, nous contre-attaquons ; mais, malgré l'énergie de nos chasseurs, nous ne pouvons reprendre le sommet du Reichakerkopf, et nous restons accrochés aux pentes ouest jusqu'à 17 heures; à ce moment l'ennemi nous rejette sur le col du Sattel; quelques poignées de nos héroïques fantassins se maintiennent pourtant sur les lisières nord et ouest du Reichakerkopf.

 

Le 21 février ,les Allemands, puissamment outillés, reviennent à la charge, et s'emparent du Bahrenkopf, puis rejettent définitivement sur le col du Sattel nos derniers éléments accrochés au Reichakerkopf. Stosswihr est menacé; la lisière est du village et le château tombent, dans la soirée, aux mains de l'ennemi.

Mais une hardie contre attaque de deux compagnies du 14e bataillon de chasseurs nous permet, avant la nuit, de reprendre le château. Malheureusement, nos batteries cessent leur tir, faute de munitions.

La neige tombe en abondance et gêne le ravitaillement.

 

Le 22

Toutes nos contre-attaques échouent; l'ennemi, continuant ses progrès, envahit le bois de Eichwald et s'installe sur la croupe 651 qui le domine, malgré la résistance héroïque de deux compagnies du 14e bataillon de chasseurs et d'une compagnie du 3e régiment d'infanterie territoriale.

 

Dans la nuit du 22 au 23 février nous évacuons Stosswihr et nous battons en retraite sur Sultzeren.

Mais les Allemands paraissent à bout de souffle et se contentent de canonner faiblement nos lignes.

 

Les journées suivantes sont calmes, nous nous réorganisons.

 

Le 1e mars, l'attaque soudaine de deux bataillons du 22e régiment de landwehr bavarois réussit à prendre pied dans les premières maisons de Sultzeren : mais nous rejetons les agresseurs sur les pentes de l'Eichwald, en leur infligeant des pertes sévères

 

 

.

L'HARTMANNSWILLERKOPF         Janvier Mars 1915

 

L'Hartmannswillerkopf, devenu si célèbre par les durs combats qui se livrèrent pour la possession de son sommet, était entièrement occupé par une section de la 1e compagnie du 28e bataillon de chasseurs.

Cette petite fraction fut attaquée le 4 janvier, à 7 heures, par deux compagnies allemandes qui l'encerclèrent; bien qu'ayant subi de lourdes pertes, la section résista héroïquement et fut dégagée, à 14 heures, par une brillante charge à la baïonnette d'un peloton du 28e chasseurs.

 

Le 9 janvier, l'ennemi lança tout un bataillon à l'assaut du sommet, où il se heurta à deux sections de chasseurs. Les Allemands furent repoussés et subirent des pertes sérieuses. Nous nous décidâmes alors à perfectionner l'organisation défensive du sommet, et à y installer une compagnie

.

Le 19 janvier, la 1e compagnie du 28e bataillon occupe le sommet du « Vieil-Armand ».

L'ennemi lance une très forte attaque après un violent bombardement. La 1e compagnie est complètement encerclée par des forces évaluées à trois bataillons; on ne peut songer à la dégager, aucune réserve n'étant disponible à proximité. Les chasseurs combattent toute la journée et toute la nuit.

 

Le lendemain

Les 13e, 27e et 53e bataillons sont arrivés en renfort et ont procédé hâtivement à la préparation d'une contre-attaque pour dégager les vaillants du 28e bataillon.

Mais l'ennemi a déjà eu le temps de creuser des tranchées et d'établir des réseaux de fils de fer ; les bataillons d'attaque se heurtent à ces réseaux et sont rejetés avec de lourdes pertes.

 

Le 21 janvier, l'attaque reprend, car on entend crépiter la fusillade de la 1e compagnie, et son héroïque clairon, le chasseur Monsieur, sonne encore la charge et le refrain du bataillon.

La nouvelle tentative pour dégager les héros échoue avec des pertes graves.

Rudes montagnards de l’Auvergne, de l'Ardèche et des Alpes, gars de l’Allier, de la Loire, du Rhône et de la Drôme, ces chasseurs du 28e bataillon vont renouveler sur le sommet vosgien, au milieu des neiges, l'exploit accompli par leurs ancêtres dans les sables brûlants de l'Afrique, à Sidi-Brahim.

Les Allemands concentrent sur le sommet un feu terrible de minenwerfer: le dépôt de munitions des chasseurs saute, le dépôt de vivres est brûlé.

Le sous-lieutenant Canavy, est écrasé par les bombes, dont un éclat lui emporte la tête.

 

Le 22 janvier, on n'entend plus la fusillade ni le clairon au sommet du « Vieil-Armand ».

Épuisée par cette lutte épique de trois jours et le trois nuits, la 1e compagnie a capitulé, ayant perdu les deux tiers de son effectif. L'ennemi reste stupéfait de ne trouver devant lui qu'une poignée de défenseurs.

Le commandant des troupes allemandes, rendant un légitime hommage à la vaillance des chasseurs, ne peut se retenir de leur lire : « Vous êtes des braves » ; et leur fait rendre les honneurs au passage, et les autorise à défiler dans Mulhouse le fusil sur l'épaule...

 

Mais la possession du sommet du « Vieil Armand », qui domine la plaine de 6oo mètres, nous était indispensable.

Un premier assaut, le 26 février, ne nous procura qu'un gain d'une centaine de mètres ; mais nous pûmes repérer exactement la ligne tenue par l'ennemi.

 

Les réglages d'artillerie, si difficiles en montagne, furent minutieusement préparés

 

Le 5 mars, nous enlevions de haute lutte un blockhaus important ; l'ennemi, qui avait massé sur cette position deux régiments, contre attaque en force: nous brisons toutes ses tentatives.

Le 152e régiment d'infanterie vient rejoindre les chasseurs pour l'assaut final qui doit nous rendre maîtres du sommet du « Vieil Armant ». Après une préparation d'artillerie de quatre heures, fantassins et chasseurs s'élancent à l'assaut, enlèvent deux lignes de tranchées et font 250 prisonniers; mais ils sont arrêtés par de nouvelles lignes de défense, à proximité du sommet.

 

Le 26, la préparation d'artillerie recommence. Puis le 152e bondit et atteint le sommet en dix minutes; sur la crête, où les arbres sont rasés par les obus et les bombes de minenwerfer, un fantassin agite un immense fanion pour faire allonger le tir de nos batteries. Nous faisons 400 prisonniers et nous dominons enfin les positions allemandes.

 

 

LES COMBATS AU REICHAKERKOPF

 

 

Le 6 mars, une puissante attaque était montée par la 47e division, dans le but de reprendre le Reichakerkopf, de nous donner de l'air à l'est de Sulzeren, et d'enlever, si possible, le village de Stosswihr.

L'attaque du Reichakerkopf était confiée au 23e bataillon de chasseurs. Bien préparée par l'artillerie, l'opération réussit en quarante-cinq minutes.

Malheureusement, les chasseurs sont arrêtés par notre artillerie qui n'allonge pas suffisamment son tir, et ils ne peuvent poursuivre l'ennemi. Mais nous résistons à toutes les contre-attaques et nous conservons le sommet.

A l'est de Sulzeren et sur Stosswihr, nous n'avons fait que de légers progrès, nos attaques ayant été prises de flanc par des feux de mitrailleuses

 

Le 20 mars, après un violent bombardement par obus et par minenwerfer, une forte attaque ennemie réussissait à nous reprendre le Reichaker, et à rejeter, encore une fois, notre ligne au col du Sattel.

 

Des contre-attaques tentées le 22 et le 23 échouent: nous sommes refoulés dans nos tranchées de départ. La proximité des lignes ennemies (à moins de vingt mètres des nôtres) rend impossible la préparation d'artillerie ; nous devons momentanément nous borner à organiser nos tranchées.

 

Mais la vaillance de nos troupes n'aura pas été inutile : elle oblige l'ennemi à maintenir dans les Vosges des unités d'élite et une puissante artillerie ; ses réserves disponibles pour d'autres attaques en seront d'autant diminuées.

 

 

Texte tiré de « La grande guerre vécue, racontée, illustrée par les Combattants, en 2 tomes  Aristide Quillet, 1922 »

Cartes tirées de l’Illustration

 

 

 

   

Haut page            Page précédente           Page d’accueil          Suite des opérations  :  L’offensive d’Artois : mai 1915