16 avril 1917
un combat faisant partie de
l’offensive française au Chemin
des Dames d’avril 1917
Depuis la fin du mois de janvier, on préparait la
grande offensive du Chemin des Dames.
L’offensive sur Laffaux ; il est impossible d'en aborder le récit brut sans avoir dit un mot des événements qui la précédèrent, de la façon dont elle fut préparée, de l'état physique et moral des troupes, et du terrain où elle allait se développer. Peut-être que ces brèves considérations, jointes à la tactique adoptée par les Allemands, admirablement servis par la configuration du champ de bataille, aideront à comprendre pourquoi cette offensive n'a pas donné la ce qu'on attendait d'elle.
Cet épisode est raconté par Charles TARDIEU
Cela s'entend de la 2e division coloniale, composée des 22e, 24e, 41e et 43e régiments coloniaux, à laquelle les conditions du combat moderne et ma position d'assaillant de première ligne me font un devoir de borner mon témoignage visuel.
Fatigue,
incertitude.
Le
1e Corps colonial (général Berdoulat) tenait les tranchées, ou y travaillait,
depuis le mois de novembre 1916; et à quel point cet hiver-là fut pénible et
rigoureux, on s'en souvient
Il
allait au grand repos quand on le lança sur les boches en retraite vers
Saint-Quentin (15-25 mars 1917); et il y retournait quand il reçut l'ordre de
remonter par étapes 'vers Soissons.
Le
8 avril,
nous relevions les éléments avancés du 19e et du 118e d'infanterie, dont la progression s'était
arrêtée à 300 mètres du village et du Moulin de Laffaux.
On
était las, transis, soutenus seulement par les nerfs. On voyait chaque jour
disparaître des camarades et s'émietter les compagnies. On était ivres de
sommeil, de fatigue et de malaise, et néanmoins décidés à en « mettre un bon
coup » pour gagner ce repos dont on nous leurrait depuis si longtemps.
Des
bruits contradictoires se répandaient.
S'il
est permis au chroniqueur d'éclairer des impressions passées à la lumière des
faits connus, il est certain que la troupe subissait les contre-coups du doute
et de l'incertitude maladroitement semés de haut.
On
attaque, on n'attaque plus. C'est pour ce soir, c'est pour demain.
Nous
marchons sur le Moulin; non, sur Laffaux ; non, sur La Motte ; nous changeons
constamment de secteur ; l'artillerie prépare mollement. Les Allemands ne
demandent évidemment qu'à se retirer, comme devant Saint-Quentin.
C'est
en vain que l'aviation signale des mouvements de troupes et des travaux; c'est
en vain que nos patrouilles sont décimées; c'est en vain que l'on constate le
travail insuffisant de l'artillerie sur les réseaux; cette persuasion est si
bien ancrée dans toutes les cervelles que les avertissements lucides du général
Berdoulat ne l'ébranlent pas.
Le
champ de bataille.
On
ne se dissimulait pourtant pas les difficultés de l'entreprise, dont la
principale résidait dans la configuration du terrain. Qu'on imagine une
succession de plateaux étroits, bosselés, coupés de chemins creux et de vallons
profonds, où s'ouvrent d'innombrables carrières, places d'armes admirables. Les
Allemands nous dominaient de leurs positions appuyées, au sud, sur le Moulin de
Laffaux qui commande la route de Maubeuge, sur le village couronnant la crête
qui surplombe et surveille la vallée marécageuse suivie par la voie du chemin
de fer; plus au nord, sur l'éminence de la ferme La Motte; enfin sur le plateau
de Moisy et les pentes boisées du mont des Singes.
On
connaissait mal les nombreuses carrières dont le pays est troué comme une
éponge. Dans le secteur d'attaque qui me fut dévolu, il y en avait deux que je
devais conquérir avec mon peloton.
Au
dernier moment, on eut connaissance d'une troisième très voisine: « Eh
bien ! me dit tout simplement le commandant Leca, vous la prendrez aussi !
»
Les
ordres arrivent.
D’autres
régiments (19e, 109e, 118e,278e,
307e, 338e d’infanterie et 20e,21e,
chasseurs)
devaient s’occuper du secteur à notre droite sur Margival-moulin de Laffaux
Le
15, peu
avant le repas du soir, arrivèrent les ordres. Nous devions marcher suivant un
axe sud-ouest-nord-est, en direction d'Allemand, Vaudesson, Anizy le Château et
Laon, dont nous étions à environ 25 kilomètres et que nous devions atteindre le
quatrième jour.
Les
hommes emporteraient quatre jours de vivres, des grenades, deux outils, deux
musettes, cent cinquante cartouches, une couverture, la toile de tente, le
masque, les ustensiles de campement, tout un « barda » qui, joint au sac et au
fusil, muait les coloniaux non pas en assaillants, mais en bêtes de somme.
L'heure
H était fixée au lendemain matin 9 heures, tandis que les corps d'infanterie
qui nous encadraient partiraient eux, dès 6 heures.
La
pluie qui, jusque-là, tombait modérément devint torrentielle.
Un
petit contingent de Sénégalais ruisselants et grelottants vint s'agglomérer à
nous. Nous passâmes la nuit à distribuer les vivres et les munitions.
Il
fallut se mettre à la recherche des caisses de grenades cachées dans le bois et
qu'on ne retrouvait plus dans les ténèbres.
On
n'entendait qu'appels, jurons, plaintes et malédictions.
Tout
le monde était énervé, exaspéré, harassé.
A 3 heures, nous mettions sac au dos, longions la voie ferrée de Margival à
Vauxaillon et nous hissions sur le plateau que traverse, au nord de Laffaux, le
chemin vicinal qui va de Neuville-sous-Margival au Moulin de Laffaux.
Il
faisait jour déjà quand nous arrivâmes dans nos lignes; et, comme nul boyau ne
reliait à elles les parallèles de départ, c'est à découvert, au nez des boches,
que nous dûmes nous y installer. On ne pouvait plus sottement les avertir de
nos intentions.
Il était 5h15.Ils nous regardèrent prendre
nos dispositions sans tirer un seul coup de fusil, soit qu'il entrât dans leur
dessein de nous laisser croire à leur retraite, soit qu'ils ne voulussent pas
dévoiler prématurément l'emplacement de leurs mitrailleuses.
La
pluie avait cessé avec l'aube, et le soleil se montrait. Le fossé rétréci où
nous attendions n'était qu'une ornière pleine d'une glaise gluante, où nous
enfoncions jusqu'aux chevilles. Nous y étions depuis cinq minutes à peine que
le boche déclenchait sur nous un tir de barrage.
Entre
deux rafales, j'examinai le terrain.
Nous
occupions nous, 24e colonial, une position nord-sud, parallèle à peu près au chemin de fer, en
travers du plateau, et perpendiculaire au chemin Neuville-sous Margival Moulin de Laffaux.
A
notre droite, le 22e colonial attaquait dans l'axe de la route de Maubeuge ; à notre gauche, le 41e dans le ravin de Babilonne;
et plus loin, le 43e colonial appuyé à Vauxaillon.
A 6 heures, nous entendons
l'assourdissant cataclysme d'artillerie (36e, 200e, 221e
régiment d’artillerie) déchaîné en amont et en aval de l'Ailette. Devant nous, nul indice de
vie jusqu'à 9 heures.
Nous
nous amusons à contempler les courbes des torpilles que nos crapouilloteurs
envoient sur le village. Nous cassons la croûte en devisant.
Nous
étions persuadés qu'il n'y avait devant nous qu'un rideau peu consistant.
L'adjudant
Figuières ne partageait pas notre optimisme. « Nous allons tomber sur un bec »,
me dit-il à voix basse.
Nous
étions un peu fébriles, impatients, anxieux.
Vers
8h30, je
fis pratiquer dans le parapet les escaliers de franchissement, et montrai à mes
hommes la direction à suivre.
Derrière
moi, je voyais les compagnies de seconde et de troisième vagues, le commandant
Leca au centre, avec le capitaine Rancoul; le capitaine Lagaillarde avec la 10e,
le lieutenant Filliette avec la 9e; le capitaine Vachey avec la 11e à ma
gauche, la 12e à ma droite.
A
8h55 : sac
au dos, baïonnette au canon. Je prépare mon petit appareil photographique et
tire ma montre. Plus que deux minutes, plus qu'une. « Attention les gars !
En avant ! »
LA
BATAILLE
Jamais
journée de combat, commencée avec les résolutions les plus viriles au coeur et
dans l'âme, les espoirs les plus fous, ne se termina dans un tel effondrement.
A
mon cri, les poilus bondissent, je les photographie: « clic » fait mon
appareil, et je saute sur le parapet. Une seconde, notre ligne hésite sur la
direction. Je fais un geste et nous partons.
En
bas, sur la route de Maubeuge, le 22e avance par bonds, et le 41e à notre gauche entre dans
le petit bois du Bessy. Les balles claquent à nos oreilles. Je me retourne et
photographie la deuxième vague.
Les
coups de fouet des balles se font plus drus autour de nos têtes et voilà les
mitrailleuses qui s'en mêlent. Ça devient sérieux. Je fourre mon appareil dans
ma capote et, la canne à la main, j'entraîne mes hommes.
Ils
avancent difficilement dans ce terrain gluant, inégal, troué comme une écumoire;
ils avancent trop chargés, légèrement courbés, la bouche ouverte, bientôt
essoufflés. Les tirs de barrage nous mitraillent d'éclats et étendent sur le
plateau un nuage épais de fumée terreuse.
Le
sergent Jourda est tué, l'adjudant Figuières est tué. Notre ligne se disloque
et semble se vider. Les deuxième et troisième vagues avancent toujours mais
combien minces déjà.
Il
me semble y percevoir un flottement, une hésitation.
Dans
le ravin de Babilonne des hommes courent, et vers le Moulin d'autres bondissent
de trou en trou.
Voici
le premier réseau.
Plutôt
que de le longer pour y chercher une brèche, nous enjambons les barbelés. Mon
ordonnance Albinge s'arrête, une cuisse fracassée. Nous trébuchons, nous nous
déchirons ; nous nous lacérons le visage, les mains et les vêtements, aux
ronces de fer. Il ne faut pas moins de deux minutes à ceux d'entre nous qui n'y
restent pas, pour nous dépêtrer de ce maudit réseau.
Enfin, c'est fait. Il me
reste à peine quelques hommes; en courant, nous traversons le chemin vicinal,
et voici la première tranchée ennemie, large fossé de boue liquide où pataugent
des mitrailleurs boches. Grenades!
Ils
lèvent les mains et filent vers nos lignes. Je jette ma canne et tire mon
revolver.
Nous
sautons la tranchée et continuons a marcher de l'avant. Deuxième tranchée vide,
et puis nous tombons dans une sorte de chemin creux, très encaissé, où nous
pouvons souffler un instant.
Des
hommes de diverses compagnies, un sergent, un adjudant sont appuyés au talus.
«
Qu'est-ce que vous faites-là, ? »
«
Mon lieutenant, dit l'un d'eux, le commandant Leca est tué, le capitaine
Rancoul aussi. Il n'y a plus d'officiers »
Je
me retourne. D'innombrables taches bleues immobiles sur le sol; des blessés
rampent ; plus loin, dans nos lignes de départ, de nouvelles vagues se
glissent.
«
Eh bien! je prends le commandement, dis-je. En avant ! »
Nous
escaladons le talus abrupt. J'ai pour voisins le caporal Baux et un fusilier.
Tandis
que Baux, calme comme au stand, s'exerce sur silhouettes mobiles, j'examine la
situation.
J'ai
l'impression encore vague que notre élan est coupé. D'innombrables,
d'infernales mitrailleuses sorties au dernier moment des carrières et
embusquées aux quatre coins de l'horizon, à Laffaux, au Moulin, sur l'éminence
de la Motte, à droite, à gauche et devant nous, balayent la route de Maubeuge,
le plateau que nous venons de traverser et celui qui s'étend, arrondi comme une
carapace de tortue sous mes yeux; des rafales meurtrières brisent net tout
départ et interdisent toute avance sur la deuxième ligne où le boche est
retranché.
C'est
la journée des mitrailleuses. Le terrain en est farci; chaque buisson, chaque
éminence, chaque noeud de tranchées en recèle une ou deux. Là-bas, du côté du 22e régiment
colonial, vers
le Moulin, une fusillade nous parvient et, sur notre gauche, on a l'air de se
battre à la grenade. Aux flancs des ravins Babilonne et du Bessy, j'aperçois
des marsouins du 41e colonial qui avancent en rampant.
Tout
le long de la crête qui domine la route du Moulin de Laffaux a Pinon s'étend la
tranchée boche du Rossignol. Je fais un signe : « En avant, suivez-moi! »
Nous
grimpons sur le plateau.
Nous
sommes une trentaine qui courons tête baissée sous les rafales que notre
apparition a déchaînées. Nous remontons la pente et, tout à coup, le réseau
ennemi nous apparaît à cinquante mètres, presque intact, inextricable,
infranchissable.
Sous
ce tir fauchant, nous nous affalons, bien arrêtés cette fois, incapables
d'aller plus loin par nos seuls moyens.
Des
trente hommes qui m'ont suivi, une dizaine sont tombés. Les autres sont
éparpillés autour de moi, dans des trous l'obus.
Je
consulte ma montre : 10h30
Le
soleil s'est caché. Le tintamarre continue et c'est à peine si je peux me faire
entendre : « Travaillez, creusez ! » leur criai-je. Ils ont compris.
Je
tire mes cartes, mon stylo, mon pistolet, nés fusées, mes feuilles de rapport
et je m'oriente.
Il
est dangereux de lever la tête. Le sergent Etchegaray, mon cousin, qui s'y
hasarde, reçoit en plein front une balle dont l'éclatement projette son vasque
à deux mètres en l'air et fait de son crâne me bouillie sanguinolente.
J'ai
l'impression d'être isolé. Derrière moi, le chemin creux ; plus loin, les
premières tranchées boches conquises où je vois des camarades arrêtés.
Ce
champ de bataille bosselé, tourmenté, pustuleux, que tout à l'heure des vagues
humaines animaient de leurs lignes ondulantes en marche, n'est plus qu'un champ
de mort couvert de cadavres éparpillés et où se traînent quelques blessés…..
Je
lance une fusée de position ; et, comme le 75 est un peu court, je demande
l'allongement, sans résultat.
Je
rédige un rapport que je confie a mon voisin. Une rafale l'abat avant qu'il ait
atteint le chemin creux. Tandis que Baux fortifie notre trou, je recommence mon
rapport.
Un
autre de mes hommes part et tombe comme le premier.
Mon
troisième coureur rampe comme un ver et saute enfin dans le ravin.
Parviendra-t-il ?
Le
combat paraît tourner au duel d'artillerie. Nous commençons à recevoir le
marmitage boche; et j'ai beau demander l'allongement du 75, mes fusées ne
servent a rien.
Le
temps passe. Les rafales de mitrailleuses font se terrer toute vie. Plus rien
ne bouge du côté du 22e colonial ni du côté du 41e.
Vers midi, un de
nos avions nous survole. J'étale mes panneaux. Puis ce sont les taubes, très
haut, sur nos têtes. Le marmitage me tue des hommes. Je n'ai plus autour de moi
qu'une dizaine de survivants et, sur le bord de mon trou, deux ou trois
cadavres. Ce blessé à la mâchoire râle maintenant.
Que
se passe-t-il donc? Pourquoi notre artillerie ne détruit-elle pas les barbelés
du Rossignol et pourquoi ne tente-t-on pas un nouvel effort ? Pourquoi cette
désolation et cette solitude sur le champ de bataille? Pourquoi les camarades,
là-bas derrière nous, n'avancent-ils pas ?
Vers 13 heures, je perçois de l'agitation chez l'ennemi. Des boches paraissent en
courant du côté de La Motte, et se jettent dans une tranchée à notre gauche.
Est-ce une contre-attaque qui se prépare?
Je
n'en puis bientôt douter. Je le signale et envoie un nouveau coureur qui
parvient à gagner le chemin creux, et disparaît.
Nous
nous défendons toujours. J'épuise mes fusées-signaux. Mon fusilier V. B.. n'a
plus de munitions. Il veut venir à moi et tombe au bord du trou en m'inondant
de sang et de débris de cervelle. Est-ce qu'on va nous laisser là, sans rien
tenter ?
Aussi
loin que ma vue s'étend, au nord et au sud, je n'aperçois plus rien ; quelque
marsouin, de temps en temps, bondit d'un trou à un autre; des têtes se montrent
au loin, derrière nous. C'est tout.
En
me penchant, j'aperçois tout de même des gens de la 11e dans un tronçon de boyau, à
ma droite.
Tout
à coup, le vallon de Bessy, au nord, retentit d'éclatements caractéristiques :
on se bat à la grenade et plus loin, vers le mont des Singes, des mitrailleuses
s'affolent. Du côté de Laffaux également la fusillade est plus nourrie. C'est
la contre-attaque.
Si
nous résistons, c'est parfait. Sinon !... Cela dure. Le vent souffle en
tempête. Le ciel se couvre. Le boche ne nous marmite plus. Dans le lacis des
boyaux, je vois distinctement l'ennemi en veste, sans sac, s'infiltrer et
avancer à la grenade.
Il est 14h30.
On
se bat derrière moi. Ça tape dur.
Au
nord et au sud, la fusillade s'espace. Tout à coup, je n'en crois pas mes
yeux !
Je
vois, oui, je vois des marsouins courir en avant, déséquipés, et se jeter dans
un boyau qui vient du chemin creux, tandis que les boches réoccupent leurs
tranchées de première ligne.
Hélas
! tant de morts, tant de sacrifices ont été vains ! Là-bas, sur la route de
Maubeuge, qu'est-ce donc que ces capotes bleues qui s'avancent?
Des
prisonniers aussi.
A
ma gauche, dans les bois qui couvrent les pentes du plateau de Vauxaillon, je
n'entends plus rien. Un silence tragique y règne que déchirent des coups de feu
espacés.
Eh!
quoi? L'échec? Quand il suffisait d'un petit effort pour culbuter l'ennemi dans
les bas-fonds d'Allemand et conquérir au moins cette crête du chemin de Pinon !
Que
faire ? Ils ne se hasardent point devant nous. Ça leur coûterait drop cher. Ils
nous entourent.
Nous
sommes foutus ! » rage Baux.
«
Résistons sur place, dis-je; nous verrons à la nuit ».
Je
n'arrive pas à comprendre pourquoi les nôtres ne prononcent pas une nouvelle
offensive. Elle nous porterait certainement au delà du Rossignol.
Le
temps passe dans cette attente angoissante. Nos munitions s'épuisent. Je n'ai
plus de fusées. D'ailleurs, à quoi me serviraient-elles? Je ne vois plus mes
voisins de droite. Au loin, la canonnade du Chemin-des-Dames a presque cessé.
Le soir commence à tomber. Nous nous soutenons de biscuits et de rhum dont ma
gourde est encore pleine. Il n'y a plus à espérer de renforts. Je ne puis pas
rester plus longtemps. « Nous allons, dis-je à Baux, gagner le chemin creux.
Peut-être est-il encore libre .
Je
bondis, poursuivi par la mitrailleuse. Je roule au fond du chemin creux. On me
tire dessus, ma chute me sauve. Des boches me couchent en joue, en criant «
kamerade »
Je
me relève et frotte machinalement mes mains boueuses à ma capote.
Ils
ne me tuent point. Ils m'emmènent... ils m'emmènent !!
Charles TARDIEU est emmené en captivité jusqu’à la fin de la guerre
D’autres épisodes de la
bataille du chemin des Dames :
Combats à
Berry au Bac et Juvincourt
Combats pour Loivre et Berméricourt