La course à la mer   -  La Bataille des Flandres

(18 octobre – fin 1914)

La bataille de l'Yser

 

 

  Les Flandres couvrent un terrain séculairement voué aux batailles. Elles ont vu, à Bouvines, nos minces des Communes abattre l'orgueil d'un empereur allemand déjà assoiffé de conquêtes. Elles ont vu, à Roosebeke, le roi de France Charles VI écraser Jacques Arteveld. Elles ont contemplé les victoires de Turenne et de Villars et frémi devant la retraite des soldats de Vendôme, battus par Marlborough.

 En 1794, elles ont assisté à l'attaque irrésistible de Mac Donald sur Roulers. Et elles ont regardé passer, éperdus et hagards, les débris de la Grande armée, en fuite après Waterloo.

Comment ces vastes plaines, sans eaux profondes, sans forêts, sans monts, n'auraient elles pas appelé irrésistiblement les grands déchaînements de la guerre ? Il n'existe pas de champ de bataille plus propice aux actions décisives.

La campagne s'y déroule si unie et si plate que les rivières n'y peuvent trouver de pente pour accélérer leur cours, et qu'elles seraient inévitablement refoulées par la marée montante sans un système compliqué d'écluses. Au dessus de ce sol flotte une brume perpétuelle.

 

 

Cette fin d'octobre 1914 va amener là le plus formidable duel de l'Histoire.

 

Le marin de Bretagne, le poilu de Paris et des provinces y fraternisent avec le goumier basané du Sahara et le Sikh de l'Inde à l'aspect hiératique sous son énorme turban kaki.

L'écossais aux jambes nues y est devenu le compagnon d'armes du Bambara soudanais aux joues tailladées.

Le marocain à l’œil d'escarboucle voisine, dans la tranchée, avec le carabinier wallon ou le mitrailleur flamand au regard placide et bleu.

 

 Des hommes sont venus ici de tous les coins de la terre pour faire reculer la ruée formidable de cette armée germanique dont le cri de guerre est devenu maintenant : « Nach Calais !! »

 

Maîtresse de la côte, l'armée du Kaiser pourrait aisément se frayer un chemin vers Paris par la Normandie et l’Ile de France.

 Les Allemands ne doutent pas du succès; et Guillaume II, rentré à Luxembourg le soir de la Marne, fait annoncer son retour au milieu de ses troupes pour présider à leur triomphe.

Mais les Alliés attendent le choc avec calme et résolution.

 

Au Grand Quartier Général français, les généraux Belin et Berthelot ont fait preuve d'une telle maîtrise dans l'organisation des transports que, nuit et jour, les trains débarquent, à l'endroit et au moment voulus, de nouvelles, troupes.

Ainsi, l'armée d'Urbal reçoit de très gros renforts.

Augmentée peu à peu de quatre nouveaux corps d'armée, elle va constituer l'armée de Belgique.

 

 

Le 18 octobre

Notre cavalerie atteint Roulers et Cortemark; et, vers le même temps, notre extrême gauche, qui se trouvait à Noyon six semaines auparavant, parvient jusqu'à Nieuport.

La coordination voulue par Joffre est en train de se réaliser.

Une solide barrière vient de s'établir à l'aide de cinq armées : Trois françaises, une anglaise et une belge.

 

Foch s'est juré de ne pas céder, inaugurant ainsi cette guerre de forteresse dont l'ennemi a déjà donné l'exemple sur d'autres points, et qui va bientôt s'imposer comme une règle commune et inévitable aux deux adversaires.

Forte d'à peine 49000 fusils, l'armée belge était arrivée, le 14 octobre, à Nieuport, dans un effroyable état d'épuisement. « Nous sommes des morts vivants » répétaient de malheureux fantassins qui, depuis leur sortie d'Anvers, avaient passé par les épreuves et les privations les plus cruelle.

 

 Maîtrisant son abattement, cette petite armée s'établit au nord et à l'extrême gauche de la ligne alliée, le long de l'Yser, de Nieuport à Dixmude.

Les Anglais, une fois leur concentration achevée, se formèrent au centre et à droite, dans la région de la Lys, et occupèrent Ypres.

Les Français, eux, furent répartis un peu partout, formant les gros bataillons de résistance, étayant de tous côtés leurs alliés, prêts à se porter, à chaque instant, au secours de l'un ou de l'autre.

 

De leur côté, les Allemands ont massé entre la Lys et la mer quinze corps d'armée, qui vont bientôt se grossir de quatre autres, et quatre corps de cavalerie.

Leur plan tient en deux opérations: d'abord, tourner notre gauche en longeant la mer, ce qui provoquera la bataille de l'Yser ; ensuite, percer notre front en quelque endroit de la grande plaine flamande, pour essayer, aussitôt après, de déborder notre droite, ce qui déchaînera la bataille d'Ypres.

 

Et il s'agit de pousser l'exécution de ce plan avec vigueur et promptitude, car le Kaiser a signifié à ses soldats qu'il voulait être à Ypres le 1er novembre, pour y proclamer l'annexion de la Belgique.

La bataille de l'Yser s'engage le 16 octobre. A cette date, le front franco-belge entre Dixmude et la mer est jalonné par les villages de Beerst, Keyem, Leke, Saint-Pierre-Capelle et Slype. Il suit à peu prés la ligne du chemin de fer routier d'Ypres à Ostende.

L'ennemi prononce une première attaque, appuyée seulement par des batteries de 150 car il n'a pas eu le temps d'amener les grosses pièces qui ont détruit les forts d'Anvers. Dés le lendemain y, l'arrivée de nos renforts d'artillerie permet d'enrayer cette offensive.

 

Le 19 octobre

Les Allemands la reprennent et enlèvent, ce jour là, aux Belges les villages de Leke, Keyem et Beerst. Arrive alors un ordre de repli le long de la rive de l'Yser, car l'État Major belge estime la ligne du chemin de fer routier d'Ostende à Ypres trop longue pour être efficacement défendue.

 

Comme conséquence de ce mouvement, la cavalerie du général de Mitry, qui occupait Thourout, est obligée de reculer sur Loo.

Notre nouvelle ligne trouve son principal défaut dans la boucle de la rivière, entre Shoorbake et Tervaete. C'est donc par là que les Allemands veulent essayer de la rompre.

 

A Lombaertzyde, ils contraignent les avant postes belges à se replier Mais ils vont surtout frapper à coups redoublés autour de Dixmude, qui se trouve désormais en flèche et constitue un dangereux saillant. Tête de pont sur la rive droite de l'Yser, la ville commande la route de Dunkerque, comme Ypres commande la route de Calais.

 

 Aussi, à partir du 19 octobre, l'ennemi conduira t il parallèlement ses attaques contre le front belge et contre Dixmude.

En occupant ainsi nos troupes de deux côtés à la fois, il espère les empêcher de se porter mutuellement secours.

Dixmude, qui va devenir le foyer le plus ardent de cette lutte, s'élève dans l'angle formé par la rivière, large d'une quinzaine de mètres, et par le canal d'Handzaëme, mince filet d'eau coulant dans un lit très profond.

Aux alentours de la ville, au-delà, sur toute l'étendue du champ de bataille jusqu'aux dunes qui bordent le littoral, le pays n'offre qu'un grand golfe desséché, un shoore, comme on dit en Flandre, qui allonge à perte de vue ses pâtis et ses guérets sillonnés par des canaux d'irrigation, les watergands.

Quelques bouleaux et des saules s'érigent en bouquets isolés.

Surmontées de moulins hissés sur chevalets, de longues digues traversent ce pays extraordinairement plat qui doit se défendre contre les crues subites de l'Yser.

Les Belges ont dû replier le gros de leurs troupes derrière la ligne du chemin de fer de Nieuport à Dixmude, en ne conservant, en première ligne, que l'artillerie et une brigade d'élite commandée parle colonel Meiser.

 

Celle ci occupe Dixmude, où elle trouve la brigade des 6000 fusiliers marins.

Composée en majorité de Bretons, cette brigade de marins a reçu pour chef l'amiral Ronarch à qui Foch a dit :

 « Il faut tenir à tout prix, mais dans quatre jours vous serez relevés ».

Et malgré les assauts les plus acharnés, le feu le plus infernal, Ronarch et ses gars héroïques tiendront pendant vingt cinq jours.

 

Dés que l'armée du duc de VVurtemberg a atteint l'Yser, en traînant avec elle une formidable artillerie, Dixmude devient son principal objectif.

 

La bataille de l'Yser : DIXMUDE

 

 Le 17 octobre, les maisons commencent à s'écrouler dans les flammes. La ville est évacuée par ses habitants.

Nos fusiliers marins, une poignée de gardes les fantassins du colonel Meiser vont rivaliser de vaillance et de ténacité pour empêcher l'envahisseur de rompre la ligne.

A 300 mètres des Allemands, les marins s'installent dans des tranchées profondes de 1.7m et soigneusement recouvertes avec des mottes de terre glaise.

En ce terrible « mouillage » où leur amiral les a « amarrés », ils vont continuer d'observer stoïquement la rigide discipline du bord. Si leur âme est prête au sacrifice, rien n'échappe à leur oeil habitué à sonder les vastes horizons, et ils commencent à faire abattre, à l'aide des petits canons belges, les moulins voisins dont chaque mouvement d'ailes apporte un signal à l'ennemi.

Dans les premiers jours, une visite vient encore exciter leur courage : celle d'un officier en tunique noire sans galons, très grand et très pâle : le roi Albert 1er par la pression émue des rudes mains qu'il serre, il comprend de suite que ce suprême coin de son royaume sera défendu avec une magnifique opiniâtreté.

 

Le 21 octobre, un bombardement en régie fait rage sur Dixmude.

Marmites et shrapnells transforment le ciel en une voûte de fer et de feu. L'église et le beffroi s'embrasent, tandis que se multiplient dans les tranchées et dans la ville les hécatombes de Belges et de Français.

Puis des trombes d'infanterie allemande s'élancent à l'assaut, dans un coude a coude qui se resserre sans cesse, malgré les sanglantes trouées que creusent en elles les fusils et les mitrailleuses des marins.

 

Cet effort se brise contre la ligne infranchissable de nos tranchées; et c'est en vain que l'ennemi renouvelle ses tentatives. C'est en vain qu'il reprend le bombardement sauvage. Ses batteries lourdes sont habilement dissimulées derrière le château de la Tour Blanche, dénommé par notre Etat-major « château de Woumen. »

 

Une feinte à l'est ne réussit pas mieux. Prévenu à temps, Ronarch envoie des réserves qui, malgré leur faiblesse numérique, font rebrousser chemin à cette pointe d'attaque, imprudemment aventurée.

Tandis qu'à Dixmude deux seules brigades tenaient ainsi tête au nord la boucle de l'Yser courait les plus graves périls.

Les réserves belges chargées du secteur situé entre Dixmude et Nieuport commençaient à s'épuiser.

Heureusement, le 21 au soir, dans Furnes, où le roi Albert a établi son Quartier Général, retentit une fanfare française : la Sidi-Brahim. C'est le 16e bataillon de chasseurs qui accourt, en avant garde de notre 42e division.

 

Elle est commandée par un chef dont la physionomie est vite devenue populaire, ce Grosetti ventru, jovial et intrépide, qui se bat à la manière de Henri IV, en faisant des mots et en cognant comme un sourd.

 

 Sans perdre une heure, il réoccupe Lombaertzyde et pousse vers Ostende, pendant que Mitry à sa droite, entraîne ses cavaliers vers la forêt d'Houthulst et enlève Bixschoote.

Les Allemands n'en foncent que plus rudement sur le centre et la ligne tenue par les Belges. ils s'emparent de Tervaete, petit village situé en aval de Dixmude, et le conservent malgré une violente contre attaque déclenchée, dés le lendemain, par nos Alliés.

Les fusiliers marins de Ronarch ont pu secourir les Belges ,car ,installées à Vladsloo, Eessen et Clercken, de nombreuses pièces lourdes les couvrent de feux dans Dixmude. La ville peut être prise à revers, maintenant que l'ennemi a forcé l'entrée de la vallée de l'Yser.

 

 Le 24 octobre, pour prévenir une attaque de flanc, Ronarch envoie, le commandant Rabot à Oudstuyvekenskerke pour établir une ligne de défense face au nord. Mais l'envahisseur est déjà parvenu à déloger les divisions belges de la vallée de l'Yser. Il lance deux assauts entre Pervyse et Ramscapelle, afin de les chasser de leur seconde ligne de défense, constituée par la voie ferrée de Nieuport à Dixmude.

 

Avec l'aide de la division Grossetti, nos alliés maintiennent leurs positions.

Néanmoins, la situation devient de plus en plus critique. Sous la pression des incessants renforts que reçoit l'ennemi, nos lignes, fortement ébranlée faiblissent, vacillent, menacent de se rompre.

Toujours maître de Tervaete et de la vallée de L’ Yser, le Commandement allemand pousse de nouvelle masse vers Dixmude, où il espère emporter la décision de la bataille.

Après avoir franchi la rivière, les divisions bavaroises et wurtembergeoises parviennent aux abords de la ligne du chemin de fer Nieuport-Dixmude, et, menaçant ainsi notre deuxième position de défense, enlèvent Pervys et Ramscapelle

 

 Le 24,Grossetti a reçu cet ordre de d'Urbal:

 « La ligne de l'Yser doit être maintenue ou rétablie à tout prix. »

Arrêtant sa marche vers Ostende, il va lancer la brigade Bazelaire sur Pervyse.

Bien retranchés et disposant d'une redoutable artillerie, les Allemands font pleuvoir une grêle de shrapnells sur nos soldats, dont la marche est d'abord hésitante. « Ouvrez vos parapluies ! » clame Grossetti.

Rassérénés par ce mot, nos soldats enlèvent leurs sacs et s'en couvrent la tête. L'audace goguenarde de leur chef a trouvé mieux pour stimuler leur élan. Plein de mépris pour les volées de mitraille qui balaient la route, Grossetti s'y installe, fait apporter deux chaises ; et, pendant une demi-heure, il dicte là ses ordres et reçoit les officiers envoyés aux renseignements. Un major anglais, en particulier, est saisi d'admiration devant cette impassibilité héroïque qui passe de loin le flegme britannique. La ville est reprise. De son côté, le commandant Rabot, avec les fusiliers marins, a réussi à réoccuper Ramscapelle.

Pendant ce temps, à Dixmude, Ronarch continuait de tenir. Malgré nos contre-offensives qui les repoussent sans cesse, les Allemands font preuve d'une audace extraordinaire.

 

 Dans la nuit du 25 octobre, un de leurs détachements réussit à se faufiler, sans être vu, entre deux tranchées et à pénétrer dans la ville par la voie du chemin de fer.

L'adversaire enlève le médecin principal  Duguet, un aumônier, l'abbé Le Helloco, le capitaine de frégate Jeanniot, et lâchement il fusille ces prisonniers. Mais les nôtres accourent, cernent les Allemands et les abattent sans pitié.

 

Le moral des fusiliers ne se laisse pas entamer par la chute des 280 et des 320, qui bouleversent leurs frêles tranchées.

Pas une minute de répit pour ces infatigables que les Allemands ont vite appris à redouter et qu'ils ont surnommés, pour leur grâce juvénile, « les demoiselles au pompon rouge ». Ils ne quittent l'intenable tranchée que pour pousser dans la direction de l'ennemi des pointes hardies et toujours effroyablement meurtrières.

Leur effectif fond avec une incroyable rapidité.

 

 Le 26, ils voient leurs rangs clairsemés se grossir de nouveaux compagnons d'armes qu'on a un peu trop oubliés dans les hommages rendus aux défenseurs de Dixmude.

Ce sont les tirailleurs sénégalais du 4e bataillon du Maroc (commandant Frérejean) et du 1e bataillon d'Algérie (commandant Brochot)

Ces braves, qui viennent de livrer de terribles combats autour d'Arras, prennent tout de suite, avec leur fatalisme résigné, leur part des périls et des sacrifices. Sans être relevés ni renforcés, ils vont soutenir jusqu'au bout les chocs furieux et le bombardement ininterrompu qui aura vite fait de les décimer.

La brigade belge Meiser ne se montre pas en reste d'héroïsme.

Partout où l'appelle sa place de combat, elle résiste à la poussée progressive de l'ennemi avec une vaillance et une abnégation admirables.

Le 12ème de ligne belge doit soutenir un violent combat prés du canal d'Handzaëme, dans des prairies qui, en raison d'un lointain souvenir de bataille, portent un nom prédestiné : Le Puits de sang.

En vain, la vague allemande déferle, à grand fracas de cris et de chants, jusqu'au bord des tranchées. Les Belges, par leur fusillade bien ajustée et bien nourrie, par leurs mitrailleuses et par ces petits canons qu'ils ont baptisés Klakke-bussen ouvrent dans les rangs des assaillants, ivres d'alcool et de rage, de si larges trouées que ceux-ci se terrent avec effroi, puis sont contraints de se replier.

 

 

Jusqu'à la fin d'octobre, les combats vont se succéder quotidiennement avec le même acharnement, non seulement autour de Dixmude, mais jusqu'aux dunes de la mer du nord.

Sur cette mer elle-même, le canon tonne, car l'amiral anglais Hood, avec des monitors et des croiseurs, bombarde les forces allemandes qui s'aventurent trop prés du littoral.

Sur lYser, la mêlée se fait plus dense et plus forcenée. Les artilleries adverses sont souvent obligées de se taire, parce que les lignes de l'ennemi se confondent avec les nôtres. De furieux corps à corps se multiplient où l'on joue de la baïonnette, du revolver et de la crosse de fusil.

Pour franchir les canaux, les fantassins allemands ont été munis de planches et ils s'élancent à l'attaque en s'en couvrant comme de boucliers. En arrivant à la rive, ils les jettent en travers des deux berges, puis courent à nos retranchements.

Mais ils n'y parviennent qu'en assez petit nombre; et, fauchés par les mitrailleuses, rejetés à la baïonnette, nombreux sont ceux qu'on verra tout à l'heure flotter inanimés sur les eaux du canal.

Les cadavres  fefdgrau s'accumulent par monceaux sur les rives de l'Yser et rougissent son cours indolent. Plus d'une fois, ils forment; en travers des canaux des barrages si hauts et si compacts que l'eau, en refluant, déborde sur les rives. Ces hécatombes, dans la boue détrempée des plaines et la souillure des marécages, laisseront à cette bataille le plus sinistre renom.

 

Mais l'effort germanique désespéré et sans cesse appuyé de forces nouvelles n'allait t il pas finir par triompher ? Épuisés, dénués de réserves, les Belges pourraient ils tenir encore longtemps

Grossetti et sa 42e division allaient ils suffire au rétablissement de la situation?

 

 

 Le 26, les Belges n'avaient plus pour toute ligne de protection que la chaussée du chemin de fer de Nieuport à Dixmude. Foch pourra dire plus tard : « Ce talus de 1,20m nous a tous sauvés. »

 

Notre Haut Commandement, jugeant l'heure particulièrement critique, appela à son aide un allié suprême : L’inondation.

 N'avait elle pas jadis sauvé la Hollande (de la marche victorieuse de Louis XIV )?

 

Il paraît à peu prés établi que celui qui eut le premier cette idée fut M. Charles Louis Kogge, « garde wateringue du nord de Furnes ».

Chargé du contrôle des grandes écluses de Nieuport qui distribuent les eaux dans les canaux de toute la région, il savait à quelles conditions il était possible de submerger lit plaine.

II présenta à l'Etat-Major belge un rapport où il montrait qu'en se servant de la chaussée du chemin de fer Nieuport-Dixmude comme d'une digue et en perçant les rives de l'Yser, on pourrait aisément « tendre les inondations »

Mis de suite au courant du projet, Foch commença par hésiter. Le talus de 1.20m  qui abritait les restes de l'armée belge résisterait il à la poussée de l'eau?

L'inquiétude qu'il éprouvait d'une situation de plus en plus grave le décida promptement, et le plan soumis par la garde wateringue fut adopté.

 

Bientôt l'eau commença à se répandre dans la plaine, non à la façon d'un mascaret, mais lentement, insensiblement! Les Allemands s'étaient étonnés de voir le feu de nos batteries lourdes concentré sur les digues du canal de l'Yser. Bientôt ils surgissaient, effarés, de leurs tranchées inondées, comprenant que les écluses étaient ouvertes. Ils ne perdirent cependant pas courage et nous attaquèrent avec une hâte impétueuse, dans l'espoir d'arriver au talus et de l'enlever avant que le flot, toujours montant, leur en barrât le chemin

 

Le 29 octobre, leur assaut fut repoussé. Le 30, les Belges qui défendaient Ramscapelle furent assaillis par des hordes hurlantes et frénétiques, serrant leurs rangs dans l'eau qui leur montait à mi-corps, souillées de fange, sordides et hideuses. Forçant à un recul précipité les Belges exténués et par trop réduits en nombre, ces hordes atteignirent la chaussée du chemin de fer.

 Le front était percé ; l'inondation semblait déjouée. Mais des renforts nous étaient arrivés l'avant-veille : le 32e corps d'armée, du général Humbert. Tandis que d'Urbal le jetait vers le sud, l'inlassable 42e division accourait vers Ramscapelle et Grossetti allait encore une fois sauver la situation.

Toutes nos batteries tonnent et empêchent l'ennemi de déboucher. Fantassins, zouaves, tirailleurs, chasseurs à pied, soutenus par trois bataillons belges, sont lancés sur Ramscapelle.

Nous essuyons un échec ; mais notre artillerie redouble de violence. Zouaves et tirailleurs, grossis par un bataillon du 131ème, s'élancent de nouveau et, à la chute du jour, Ramscapelle est enlevé, les Allemands sont rejetés dans les eaux à la baïonnette. Une multitude de cadavres feldgrau flotte sur la lagune, tandis qu'Humbert contre attaque violemment au sud est de Dixmude.

 

Trois jours plus tard, la 42e division entrait en liaison avec les fusiliers marins de Ronarch et attaquait, de concert avec eux, le château de la Tour Blanche (ou de Woumen)

 Mais avec ses caves bétonnées, ses chevaux de frise, ses fourrés barbelés, tout son ensemble formidable de défenses, le château se trouve à l'abri des bombardements par 75 et 90 et, la mort dans l'âme, nous devons abandonner la partie.

L'inondation, heureusement, allait se charger de réparer cet échec.

 

A notre gauche, l'ennemi était déjà contraint d'abandonner la rive gauche de l'Yser, en aval de Dixmude. Nos reconnaissances réoccupaient tous les passages. L'ennemi en retraite abandonnait des prisonniers, des blessés et des batteries enlisées. La grande nappe liquide s'étalait sur une longueur de trente kilomètres et une largeur de cinq, entre Dixmude et Nieuport.

Pendant ce temps, Dixmude achevait de mourir.

Ses carrefours étaient transformés en charniers.

Pendant huit jours, le bombardement redoubla, s'acharnant particulièrement sur le cimetière.

Les mêmes assauts furieux continuaient à se succéder contre nos tranchées, presque toujours reprises aussitôt que perdues. Mais les Allemands, recevant des renforts, se décident à sacrifier dix mille hommes pour prendre Dixmude et passer l'Yser.

 

Sous cette formidable poussée, nos premières lignes finissent par craquer du côté de la route d'Essen. Nos sections décimées se replient en bon ordre vers la ville et s'y barricadent.

Mais le sort de Dixmude est déjà décidé.

 

 

 On est au 10 novembre.

L'ennemi surgit maintenant de tous les côtés, à droite, à gauche, devant, derrière, traquant dans leurs réduits suprêmes marins, Sénégalais et Belges.

Une effroyable mêlée, un enchevêtrement inextricable d'hommes qui luttent en désespérés, ensanglante les derniers quartiers restés entre nos mains.

On se bat à la baïonnette, à coups de crosses, à coups de pierres, à coups de poing.

 

Les Allemands ont réussi à faire des prisonniers, qu'ils réunissent au bord de l'Yser. Parmi eux se trouve le lieutenant de vaisseau Sérieyx, grièvement blessé à l'épaule.

Lâchement, les Allemands poussent ces prisonniers vers la rivière, en direction de nos tranchées, et s'abritent derrière leurs corps.

Ils ordonnent au lieutenant de vaisseau de sommer les défenseurs de se rendre.

 « Y pensez vous? répond froidement Sérieyx. Ils sont dix mille vous n'êtes qu'une poignée. Comment voulez vous qu'ils se rendent ? »

 

Mensonge héroïque, car il peut attirer en quelques secondes la mort sur son auteur.

Mais, brusquement, la fusillade éclate sur la droite de l'ennemi. Sérieyx fait signe à ses hommes; et, leur donnant l'exemple, il se jette dans l'Yser, nage vigoureusement de son bras valide et réussit avec quelques marins à gagner l'autre rive.

 

C'est l'heure suprême où, après vingt-cinq jours d'endurance surhumaine, la défense en est réduite à ses derniers soubresauts, et où il va falloir abandonner ce monceau de ruines et de cendres qu'est devenu la calme et silencieuse petite ville flamande.

Tandis que sonne le clairon de la retraite, les plus entêtés à combattre brûlent leurs dernières cartouches derrière les débris fumants des barricades, puis refluent sur l'Yser dont l'amiral s'apprête à faire sauter les ponts.

 

L'ennemi n'a pu passer la rivière et il ne passera pas. Les deux tiers des pompons rouges sont tombés pour lui barrer la route.

 

Par suite de l'inondation, Dixmude martyre ne pouvait plus remplir son rôle de tête de pont. Derrière elle s'étendait une nappe d'eau d'une lieue de large, infranchissable à l'armée la mieux outillée. Dunkerque n'avait plus rien à redouter.

Les armées du kronprinz Ruprecht de Bavière et du duc Albrecht de Wurtemberg avaient vainement laissé plus de cent mille hommes dans l'herbe des prairies, le limon des marais ou les eaux ensanglantées.

 

 

 

Pour tout espoir, il ne restait plus à l'ennemi qu'à fondre, au sud, sur Ypres, en prenant pour seul objectif: Calais.

Ce sera la bataille d’Ypres

 

 

 

 La Bataille d’YPRES

 

Sans ce laisser décourager par leur échec sur l’Yser, les Allemands allaient essayer de frapper un coup décisif. N'ayant pu tourner sur la côte notre flanc désormais inaccessible, ils voudront tenter de percer notre front sous le choc de forces considérables et sans cesse accrues.

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 Le 18 octobre, notre cavalerie avait atteint Roulers et Cortemark. En même temps, le général Bidou, commandant les 87e et 89e divisions territoriales, organisait à Ypres un contre défensif pour donner la main à l'armée belge.

 

Ypres, la vieille cité marchande du moyen-âge, allait devenir l'axe d'une lutte dont elle sera la fière victime.

Sa situation topographique va rendre difficile et longue sa retraite ,car elle forme un saillant des plus mal couvert, dont la pointe s'accuse au village Subürb.

Le Commandement ennemi a massé dans la région quinze corps d'armée sous les ordres du kronprinz de Bavière, du duc de Wurtemberg, du général von Fabeck et du général von Deimling.

Deux de ces corps sont composés, pour la plus grande part, de jeunes volontaires universitaires qui marchent enivrés par la certitude de la victoire.

Au début de la bataille, les alliés sont loin de pouvoir disposer de troupes aussi nombreuses.

Cent mille hommes seulement vont se heurter à cinq cent mille.

 

Plus tard, au cours de cette mêlée de trois semaines, désespérée et furieuse, même avec les renforts qui arriveront à Foch, l'égalité numérique ne pourra jamais être atteinte.

Heureusement, tant que la lutte se disputera, la plus étroite fraternité d'armes ne cessera d'unir les Français de l'armée d'Urbal aux Anglais du maréchal French et des généraux Douglas Haig, Rawlinson et Allenby.

Ce sont les Anglais qui vont supporter le premier choc. Ils sont soutenus par les éléments français dont on a pu disposer, notamment par le 2e corps de cavalerie de Mitry.

 

Le 19 octobre

French espérait encore prendre l'offensive sur Bruges et Gand. Son 1e corps d'armée (Douglas Haig) se met en marche dans cette direction; mais, dés le 21, il est arrêté à Saint-Julien, tandis qu'à sa droite, le 3e corps britannique subit un assez grave échec à Comines, sur la Lys.

 

La poussée ennemie fait reculer en même temps les territoriaux de Bidou et les cavaliers de Mitry. Haig juge alors prudent de différer son offensive; Et, durant deux jours, il ne peut résister que difficilement à de fougueuses attaques, tandis que, se reliant à Dixmude, Mitry forme barrière au nord.

Mais Foch, ainsi que French, croit à l'opportunité d'une offensive dans le Nord, car il a appris que les Allemands avançaient avec lenteur et qu'ils étaient sur le point de manquer de munitions.

De plus, en cas de repli, la retraite dans la région d'Ypres serait si difficile qu'il n'était que prudent de porter la bataille plus en avant. Tandis que notre 9e corps (général Dubois) progresse sur Passchendaele, Mitry reprend Bixschoote (37e RI).

 

Mais l'ennemi riposte si vigoureusement que c'est tout juste si, le 24, nous avançons d'un kilomètre. Trois jours après, les rangs ennemis se grossissent d'une partie des forces chassées par l'inondation.

 

Le 27 octobre

Mitry avance légèrement au nord de Langemark, mais la division Rawlinson, assaillie par des masses énormes d'infanterie, est obligée de rendre le terrain conquis.

La progression des alliés se trouve décidément arrêtée; et même les troupes britanniques fléchissent gravement. La concentration germanique est opérée. Ypres devra supporter les plus âpres assauts.

Guillaume II a fait savoir à ses soldats qu'il assisterait à la bataille, et qu'il entendait faire à Ypres une entrée triomphale, en attendant d'atteindre Calais.

Aussi le kronprinz de Bavière a t il écrit, de Douai, dans une lettre lue à ses troupes, que « le coup décisif allait être frappé »

 

 Le général von Deimling annonce, par une proclamation, que la victoire sera aisée à remporter, car on ne combat que « des Anglais, des Hindous, des Canadiens, des Marocains et autres racailles de cette sorte. »

 

Le 29 octobre

Huit corps d'armée se jettent impétueusement à l'assaut. Ypres, que nos troupes sont obligées de traverser, devient le but d'un infernal bombardement. Une division du 32e corps, qui vient d'arriver en automobile, fait belle contenance et même parvient, ainsi que le 32e corps, à avancer.

Mais, le lendemain, après une alternative de succès et de revers, le 1e corps anglais est obligé de céder devant des forces très supérieures et de laisser aux Allemands le village de KleinZillebeke. Une perte plus grave encore, celle d'Hollebeke, livre à l'ennemi une des voies d'accès d'Ypres et va lui permettre d'approcher de très prés la ville. Prévenu à temps, Dubois envoie trois bataillons de zouaves reprendre le village. Ils y réussissent par une véhémente contre-attaque.

 

Le 31 octobre, renforcés de divisions françaises envoyées par Foch, les Anglais reprennent hardiment l'offensive.

Mais un nouvel assaut des Allemands emporte Hollebeke, Zandvoorte et Gheluvelt, ainsi que Messines.

Dans ces conditions, notre front est percé et il semble, hélas  que rien ne peut plus empêcher l'ennemi de faire sur Ypres la trouée qu'il espère si ardemment.

Déjà, entre Wytschaete et Saint Éloi , une colonne bavaroise fonce droit sur Ypres; et, en arrière de Saint Éloi , on n'est pas encore arrivé à rétablir la ligne britannique crevée. En outre, nos contingents qui occupent l'extrême front vont être coupés de leur ligne de retraite.

Mais un chef plein de décision, le général Moussy, se trouve là. Il a été détaché en mission auprès du général Haig.

Comprenant le péril et qu'il faut à, tout prix repousser l'audacieuse colonne bavaroise avant qu'elle n'ait eu le temps de se retrancher, il envoie son escorte à la recherche de renforts. Ses cavaliers lui rendent compte que les unités voisines sont toutes engagées; le général Moussy renvoie son escorte vers l'arrière, avec ordre de ramener tous les hommes valides qui seront rencontrés.

 

Bientôt sont ramenés deux cent cinquante hommes portant les uniformes de toutes armes, des « spécialistes », des ouvriers et employés militaires de toutes catégories : Cuisiniers, tailleurs, cordonniers, secrétaires d'Etat major, ordonnances, puisatiers, appartenant pour la plupart au service auxiliaire :

 « Mes enfants, leur dit le général, la situation est critique. Nous allons nous dévouer pour la sauver »

 

Les cuirassiers de l'escorte prêtent leur sabre ou leur lance à quelques uns de ces singuliers combattants, presque tous désarmés, puis mettent pied à terre.

A leur tête, Moussy s'élance.

La petite troupe se défile derrière les ondulations du terrain, avance par bonds, se rapproche peu à peu des Bavarois. Puis, tout à coup, ceux ci entendent une grande clameur et voient se ruer sur eux une bande gesticulante et frénétique dont ils n'ont pas le temps de reconnaître l'allure ou le nombre.

Et, alors une lutte disproportionnée s'engage entre les ennemis aguerris, bien équipés, bien armés, et ces fantassins d'occasion qui brandissent des armes hétéroclites.

L'élan est si impétueux, le choc si violent qu'une sorte de panique irraisonnée s'empare de ceux qui tout à l'heure menaçaient la ville et qui maintenant, faisant demi-tour, s'enfuient à toutes jambes vers leurs lignes.

Cette charge héroïque devait rester célèbre à l'armée de Belgique, et, le soir du 31, on disait dans les tranchées que le général Moussy avait sauvé Ypres.

 

Sur presque toute l'étendue du champ de bataille, les événements continuaient à donner les plus sérieuses inquiétudes. Un effroyable bombardement faisait rage et venait de tuer l'un des divisionnaires de Haig et de blesser l'autre. Dans l'angoisse qui commençait à l'envahir, le maréchal French songeait à l'abandon de la cité. Il se rendit à Vlamertinghe, au Quartier Général de d'Urbal, pour lui soumettre la décision à laquelle il se croyait réduit, et prendre ses avis.

Heureusement, il trouva Foch dont l'optimisme le réconforta. Il expédia de nouveaux ordres (les ordres de Foch) à l'armée britannique. En dépit du péril et du sort contraire, o allait tenir.

Vaillamment, les Anglais contre attaquèrent dans l'après midi.

Le 2e régiment du Worcestershire, en particulier, livra un magnifique assaut et reprit Gheluvelt. A ses côtés, notre 32e d'infanterie sut se montrer digne de sa vieille réputation. Le 4e zouaves fit aussi merveille. Haig écrira, le soir de la bataille: « Les troupes anglaises et françaises combattirent côte à côte sous le commandement de l'officier le plus élevé en grade, en union si complète qu'elles ne tardèrent pas à se trouver complètement mélangées. » C'était porter la fraternité  d'armes à son maximum.

Bientôt, Messines était repris à la force des baïonnettes et notre ligne devant Ypres se retrouvait intacte.

 

Dans la nuit de ce même 31, une attaque était entreprise par les troupes françaises contre le château d'Hollebeke. Elle avait été confiée aux 9e et 16e brigades de dragons qui mirent pied à terre.

Mais les Allemands ne se laissent pas surprendre. Ils ont disposé autour du château des embuscades qui reçoivent notre avant garde par une vive fusillade.

Dissimulés en d'étroits fossés, où ils ne trouvent qu'un faible abri, les dragons tiennent, dans les plus dures conditions, jusqu'aux dernières heures de la matinée.

De terribles feux d'artillerie et de violentes contre attaques d'infanterie rendirent impossible l'assaut du château.

La 16e brigade ayant été attaquée par des forces prussiennes supérieures en nombre, les hommes se défendirent à coups de crosse de mousqueton quand les munitions furent épuisées.

 

Le 1 novembre, les Anglais perdirent encore Wytschaete, Messines et la crête couvrant Ypres. Mais notre 91e corps reprit Wytschaete. Ensuite les corps Humbert, Dubois, de Mitry et Conneau déclenchèrent simultanément une contre offensive au nord et au sud d'Ypres, continrent la poussée de l'ennemi et le firent même légèrement reculer. Guillaume il, découragé, regagna Luxembourg.

 

je possède les 5 cartes détaillées des combats de la région d'Ypres de cette période, si vous êtes intéressé, envoyez moi un mail...

 

Jusqu'au 6, une sorte d'accalmie persista. Puis ce fut un déchaînement effroyable d'artillerie.

L'élite allemande allait tenter la ruée suprême, car la Garde prussienne, commandée par le général von Plattenberg, entrait en ligne.

Huit jours durant, un véritable raz de marée essaya de submerger nos positions. Trois divisions françaises étaient arrivés à temps pour renforcer les troupes alliées sur les points faibles.

A l'est d'Ypres, les corps Dubois, Balfourier et Haig soutinrent victorieusement le choc. Le 9e corps, aidé par les divisions territoriales de Bidou et la cavalerie de Mitry,

résista vaillamment aux efforts de trois corps allemands qui avaient été lancés, quelques jours auparavant, sur l'Yser, et déjoua ainsi leur intention de nous tourner par le nord.

C'est au cours de ces luttes sans merci que se place un sublime épisode, qui restera dans les mémoires françaises comme un pendant de la mort héroïque de d'Assas. A Drie Grachten, une colonne allemande se porte à l'attaque d'un pont défendu par le 1e zouaves.

Elle pousse lâchement devant elle des zouaves faits prisonniers. Un instant interdits devant ce spectacle, nos soldats suspendent leur tir. Mais un cri part soudain du groupe des prisonniers, voués à la mort: « Tirez donc, nom de Dieu, ce sont les Boches! »

Les défenseurs du pont répondent par une décharge qui couche à terre, avec les Allemands, les zouaves héroïques à jamais inconnus

 

La journée du 11 fut marquée par plus d'acharnement encore. Parvenues jusqu'à notre première ligne et sous la protection d'un effrayant barrage d'artillerie de 105 et 150 les divisions allemandes, décimées par nos contre attaques, durent reculer avec des pertes énormes.

 

 Le 13 et le 14, elles essayèrent encore d'ébranler nos lignes. Tentative aussi infructueuse que les précédentes. Enfin, en présence du caractère inexpugnable qu'avaient acquis nos positions, les attaques de l'ennemi se ralentirent, puis cessèrent Alors, pour se venger de cette résistance, les Allemands s'acharnèrent à la destruction d'Ypres et de ses merveilles architecturales.

 

La cathédrale et la Halle aux Drapiers s'écroulèrent sous le tir des canons lourds. La vieille cité ne fut bientôt plus qu'un monceau de ruines fumantes.

 

 

 

La seule bataille d'Ypres coûtait à l'ennemi plus de cent cinquante mille hommes.

Mais ce qui restait de la Belgique était sauvé. Dunkerque et Calais voyaient s'évanouir la menace qui pesait sur eux. L'invasion se trouvait solidement endiguée dans une France délivrée. La victoire des Flandres continuait la victoire de la Marne

 

La guerre de mouvement était terminée pour longtemps, et toujours face à face les deux armées allaient se stabiliser pendant longtemps dans les tranchées

 

 

 

 

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