HISTORIQUE

DU

110e  Régiment d’infanterie

 

 

Retour accueil

Voir les photos du 110ème RI

Voir le carnet de guerre du soldat Amédée MUYLS du 110e RI : 

 

 

Merci à Christian (pour l'historique) et à Dominique pour la recopie

 

 

SOMMAIRE :

AVANT-PROPOS

Août à décembre 1914 : LA MARNE

ANNÉE 1915

VERDUN (février-mars 1916)

LA SOMME

LA JOURNÉE DU 16 AVRIL 1917

REPOS   Avril-juillet 1917

LES FLANDRES juillet-décembre 1917

L'AUBE DE LA VICTOIRE : L’OURCQ janvier-jullet 1918

L'AILETTE

LA VICTOIRE septembre-novembre 1915

EN PAYS CONQUIS

ORDRE DE LA DIVISION

CITATIONS OBTENUES PAR LE RÉGIMENT

 

 

AVANT-PROPOS

 

En hommage à nos Morts.

 

Quelques milliers d'hommes qu'on dote des mêmes écussons ne suffisent pas pour constituer un régiment; il faut que cette multitude d'individualités disparates, de volontés souvent contradictoires arrive à former corps, un corps organisé; il faut surtout qu'un même esprit, une volonté unique anime tous les membres de cet organisme. Un régiment doit avoir une âme.

Un chef éminent, le lieutenant-colonel LÉVI, aidé de cadres jeunes, actifs, enthousiastes, avait, dès le temps de paix, laborieusement, patiemment façonné l'âme du 110e, l'avait préparée à tous les dévouements, à tous les sacrifices.

D'aucuns se souviennent encore de cette revue du régiment à Coudekerque-Branche, qui précéda le départ de Dunkerque; il était au point, il ne lui manquait que la consécration du champ de bataille.

Elle ne lui manqua pas; manifestant les vertus que réclamaient les événements, son âme s'anoblissait, se fortifiait dans l'épreuve. La Marne révélait son esprit d'offensive.

Les durs débuts de la guerre de tranchées, son indomptable énergie dans la lutte contre les éléments naturels et un ennemi plus nombreux, mieux outillé; à Verdun, son esprit de sacrifice triomphait des moyens matériels les plus formidables.

Un mois de combats incessants dans la Somme n'entamait pas son endurance, ni la déception du 16 avril 1917, sa force dans la fortune contraire.

Riches de promesses et d'espérances, les journées des Flandres préludaient aux combats de l'Ourcq et de l'Ailette où il se sentit frissonner aux premiers rayons de la Victoire.

Cette troupe, qui montre dans Mayence (14 décembre 1918), sous les yeux de l'ennemi vaincu ses rangs compacts bleu horizon, c'est bien le même régiment qui alignait en 1914, dans les prairies de la Flandre, ses bataillons bleu et garance.

Il a des traditions faites de l'exemple toujours agissant donné à ceux qui restent par ceux qui sont tombés; de la flamme que lui ont inspirée des Chefs admirables, des vertus guerrières de ses Soldats.

Son histoire est si riche qu'on ne peut tenter de la raconter sans éprouver aussitôt l'impossibilité de faire tenir en quel­ques pages une pareille moisson d'héroïsme et de gloire.

 

 

Août à décembre 1914 : LA MARNE

 

 

 

L'enthousiasme qui présida la mobilisation, l'élan d'un peuple entier qui se dresse sous l'outrage sont encore trop présents à toutes les mémoires pour qu'il soit nécessaire d'y insister; qui a vécu ces heures ne les oubliera jamais.

Dans Dunkerque et Bergues, les réserves rejoignaient leur dépôt; de tous les magasins sortaient les armes, effets et équipements qui y étaient réunis. Dans les cours des casernes les rassemblements s'opéraient, on constituait les escouades. Les nouveaux venus prenaient contact avec leurs chefs et leurs futurs compagnons d'armes. Une bonne volonté réci­proque facilitait ces opérations et si parfois on apercevait quelques scènes d'attendrissement, les larmes étaient refou­lées bientôt par le sentiment impérieux du devoir à accom­plir.

 

Dès le 7 août, le Régiment à effectifs complets (58 offi­ciers, 3.366 hommes) s'embarquait en trois échelons vers sa région de concentration : Hirson.

Troupe de couverture de la région du Nord, il devait être de ceux qui eurent à subir le premier choc et à plier devant le nombre.

L'Allemagne, renonçant à attaquer de front la frontière lorraine, préférait au prix de la violation de la Belgique, porter le gros de ses forces sur la Meuse. Après quatre jours de marches accablantes, où les réservistes, déshabitués du sac, luttent de résistance avec les hommes de l'active, le Régiment arrive sur la Meuse le 15 août.

Le même jour, au 3e bataillon échoit la mission de défen­dre le passage du fleuve et, en particulier, l'accès du pont de Houx.

Pendant huit jours, les compagnies sur la rive gauche surveillent étroitement l'ennemi, lancent des patrouilles sur la rive droite vers Evrehailles et ramènent des prison­niers. Les autres bataillons commencent à creuser des tran­chées aux alentours de Haut-le-Wastia et d'Anhée.

Mais l'ennemi, dont le plan est de réduire la France dans le plus court délai pour pouvoir ensuite faire face à l'Est, a déjà passé la Meuse.

Les citadelles belges tombent; le 23, la 2e Division reçoit l'ordre de prolonger à gauche la 1e Division, de façon à occuper la côte Saint-Gérard - ferme Saint-Laurent.

Le Régiment prend une formation articulée près du vil­lage de Graux; mais avant qu'il ait eu à intervenir, il est envoyé au secours de la 51e Division de réserve qui a été refoulée sur la ligne Sornmière - Anhaye, avec mission d'at­taquer et de rejeter à la Meuse les éléments qui sont passés sur la rive gauche.

Le soir, à la lueur des incendies allumés par un ennemi sauvage, au crépitement des balles, à la son­nerie lugubre des clairons qui lancent leurs appels dans la nuit scintillante d'été, le Régiment s'installe au bivouac près de Génin, se protégeant par des avant-postes de combat.

 

Le lendemain commence la longue série de marches qui des bords de la Meuse ramène nos troupes vers la Seine, d'où elles s'élanceront pour la riposte.

L'ennemi a une telle supé­riorité qu'il faut momentanément renoncer à le contenir. Que peuvent les troupes belges, quelques corps d'armée fran­çais? C'est au milieu de l'abattement et du désespoir des populations qu'il faut rebrousser chemin, franchir à nou­veau la frontière.

Une retraite est toujours une opération délicate.

 

Mais des chefs remarquables sont à la tête du Régiment et de la Brigade; à plusieurs reprises, en particulier le 24 août, le lieutenant-colonel Lévi sauve son Régiment; la 4e Brigade est entre les mains du colonel Pétain, ce nom dit tout.

Un moment on conçoit l'espoir d'arrêter la marche envahissante de l'ennemi. Mais cette espérance est vite trompée. Le 29, le Régiment s'était porté à l'attaque derrière la 1e Division, qui a débouché de Le Hérie-la-Viéville; le 1e bataillon atteint sur le soir et dépasse la ferme de Bertaigne-Mont, qui flambe, mais le lendemain matin le repli du 8e sur Landifay entraîne celui du 110e; la 4e compagnie (compagnie Orthlieb) est même à un moment gravement exposée, elle n'est dégagée que par une intervention vigoureuse de la 3e compagnie (compagnie Marteau).

 

Du 27 au 31 août, le 3e bataillon avait été détaché du Régiment comme soutien de la 4e Division de cavalerie et comme garde des ponts de l'Oise, face au nord.

 

Le 29, il défend les passages du Thon. Le 30 août, afin de rejeter l'ennemi sur la rive droite de l'Oise, l'ordre est donné d'attaquer au lever du jour le village d'Haution : trois com­pagnies (9e, 10e, 11e) se portent directement de Laigny sur Haution, appuyées à droite par une brigade de dragons; mais aux lisières mêmes de Laigny, elles sont clouées sur place par le tir des mitrailleuses.

Le chef de bataillon Mauqui est tué. La 12e compagnie, chargée de maintenir la liaison entre les autres compagnies et la 51e Division de réserve, avait reçu la mission de se porter de Franqueville sur Voulpaix, mais l'ennemi revint à la charge. Le sergent Crespel, pour échapper à sa poursuite, cerné de toutes parts, doit cacher ses mitrailleuses dans un ruisseau.

 

Le 1er septembre, le Régiment repasse l'Aisne à Pontavert; le 3, la Marne à Damery; au matin du 6 septembre, à la sortie de Bethon et de Chantemerle où ils ont cantonné, les bataillons réunis derrière les faisceaux reçoivent communi­cation de l'ordre du jour du Général en chef :

 « Il faut faire face en avant, repousser l'ennemi et se faire tuer sur place plutôt que de reculer ».

 

Et, sans tarder, ils s'élancent pour reconquérir le terrain que l'énorme supériorité de l'adver­saire nous avait contraint d'abandonner.

A travers les taillis de cette région boisée, le Régiment se porte sur La Noue et son château, tient en échec jusqu'à 14 heures les contre-attaques ennemies, rompt sa résistance et s'installe le soir même dans le bois de Gril d'Arcan.

C'est pendant dix jours l'ivresse de délivrer chaque jour de nouveaux villages, de voir rentrer dans leurs demeures un instant abandonnées les lamentables convois de fugitifs, de cueillir bon nombre de prisonniers.

L'ennemi se cache dans les bois, résiste d'abord furieusement à Esternay, qu'il est contraint d'abandonner par le 73e, suivi de près par le 110e.

 

Bergères et le moulin Henry sont occupés le 8, Vauchamps est dépassé le 9, mais l'avance est retardée par la résistance allemande près du pavillon de chasse des Mouli­nots.

 

Avant-garde de la division le 10 septembre, il traverse Orbais tout souillé encore des traces du pillage et, par Igny-le-Jard, gagne Verneuil où il installe une tête de pont.

La pluie vient s'ajouter aux souffrances des hommes épuisés par un mois de marches, le ravitaillement est insuffisant, mais tous marchent d'un même entrain.

Le Régiment can­tonne à Montigny le 11, dans cette vallée de la Marne qui devait donner son nom à cette victoire, le 12 à Sacy, le 13, dans les faubourgs de Reims, Tinqueux, Saint-Brice et fau­bourg d'Epernay.

 

Revenu à Reims le 14, il est exposé à un bombardement dirigé contre les rues situées entre l'hôtel de ville et la gare, prélude de la systématique destruction qui ne cessera qu'en 1918.

 

Le 16, faisant face à l'ouest, le 110e va s'établir à Roucy.

De la route de Roucy à Ventelay, qu'il avait parcourue le 2 septembre et par laquelle il revient le 16, on aperçoit à perte de vue le terrain qui, s'abaissant entre les hauteurs de Craonne et Prouvais, donne accès vers la plaine de Sissonne.

 C'est là que vient se briser, devant l'organisation défensive de l'ennemi, notre riposte victorieuse de la Marne, que le manque de munitions d'artillerie nous empêche de pousser à fond.

Là prend fin le genre de combats qui ouvrent la première partie de la guerre : finis les déploiements de bataillons, des régiments au grand soleil; une autre guerre y prend naissance, plus sournoise, aussi âpre, la guerre des tranchées.

Tapis à quelques mètres les uns des autres, n'ayant pour s'observer que la fente du créneau ou le regard furtif risqué au-dessus du parapet, les adversaires vivent dans un éternel qui-vive.

S'ils tentent d'aborder les tranchées de l'un ou de l'autre, des mitrailleuses soigneusement dissimulées et démasquées au moment opportun fauchent les rangs des assail­lants.

L'artillerie allemande, supérieure en nombre et mieux approvisionnée que la nôtre, démolit journellement les pau­vres abris, simples trous creusés dans la terre et couverts de paille d'abord, puis bâtis en rondins. L'inquiétude des veilleurs fait déclencher chaque nuit d'interminables fusillades.

Rebelles les premiers jours à ce qui contrarie profondément et leur éducation et leur instinct guerrier, les hommes ne tardent pas à se convaincre de la nécessité de se protéger, et la plaine du Choléra, les abords de la Miette se creusent en un système puissant de tranchées et de boyaux.

Longtemps l'idée que l'offensive peut être reprise et poursuivie obsède les esprits, mais les moyens matériels sont nuls, quelques coups parcimonieux de 75 ne peuvent entamer les défenses de l'ennemi, déjà formidables. Les attaques d'octobre sont vouées à l'insuccès.

 

Le 17 septembre, le Régiment était venu s'installer sur les deux rives du petit ruisseau de la Miette, le 3e bataillon sur la rive droite, le 2e bataillon vers le Choléra.

La journée avait été meurtrière : le colonel Doyen, commandant la 4e Brigade, fut tué de plusieurs balles au moment où il parcourait la ligne de tirailleurs.

Le lieutenant-colonel Lévi le remplace à la tête de la brigade, tandis que comman­dant Dujardin (commandant le 1er bataillon) prend le commandement du Régiment jusqu'à l'arrivée (19 septembre) du lieutenant-colonel Buffet.

L'attaque d'ensemble prévue pour le 24 septembre est remise.

 

Le 6 octobre, le 1e batail­lon appuie le 8e R. I., qui a pour mission de s'emparer, à la faveur d'une explosion de mine, de la corne sud-est du bois de la Ville-aux-Bois, lequel prit le nom de Bois de la Mine. L'opération réussit pleinement.

 

Le 12 octobre, l'ordre d'attaque est donné par le général commandant le 1e Corps d'armée. Deux objectifs doivent être successivement atteints : le bois de la Miette, le Choléra. L'attaque sur la ferme (3e bataillon) ne doit commencer que lorsque le premier objectif sera enlevé.

Après une prépara­tion de quelques minutes, le 8e commence son mouvement en avant sous bois, appuyé par une section de la 6e compagnie; la 7e compagnie, avec deux sections de la 5e compagnie progressent également, malgré un feu violent.

Cette journée nous avait permis de nous installer à proxi­mité de la route Choléra - Ville-aux-Bois, à peu de distance d'un treillage de fils de fer jusque-là invisible.

Une nouvelle tentative pour avancer le 13 est infructueuse.

Après quelques jours de repos à Roucy (1e bataillon), Romain (2e bataillon), Ventelay (3e bataillon), le Régiment revient le 22 remplacer le 8e; une tentative allemande (régiment saxon) contre nos tranchées échoue (28 octobre).

Renforcé par le 201e qui occupe la presque totalité de la première ligne, le Régiment échelonne des lignes jusqu'à Roucy, profite de l'accalmie qu'on constate en novembre pour perfectionner les travaux, donner aux hommes des abris où ils puissent goûter un peu de repos.

Le Mont Doyen, qui constitue un bon observatoire, et la Pêcherie, qui sert de poste de secours et de poste de com­mandement, sont visés presque quotidiennement; un incen­die se déclare même à la ferme le 7 décembre, mais l'ennemi semble avoir retiré, pour l'utiliser ailleurs, une partie de son artillerie.

 

Le 9 décembre, le Régiment cède son secteur au 148e et va cantonner à Fismes, Basoches, Saint-Thibaut. Ainsi se clôt une première partie où à côté de nos premiers revers prend place la victoire décisive de la Marne : période d'ini­tiation où l'on voit qu'à son ardeur dans l'assaut le 110e sait allier le travail fécond et incessant qui seul permet de limiter les pertes et d'organiser la défense du terrain.

 

ANNÉE 1915

 

Pour qui embrasse d'un seul regard la longue période qui va de décembre 1914 à février 1916, elle apparaît sur un fond de grisaille, malgré les lueurs tragiques qu'y projettent les combats de Mesnil, des Eparges et de la Tranchée de Calonne comme une suite ininterrompue de jours monoto­nes et de travaux incessants.

De part et d'autre on augmente fiévreusement le matériel, on s'acharne à rendre le front inviolable.

Du côté de l'ennemi, aucune tentative sérieuse. L'avortement des offensives d'Artois et de Champagne nous convainc que la guerre sera longue et ne se décidera que lorsqu'un des deux adversaires, dont les forces actuellement se balancent, aura acquis sur l'autre une écrasante supériorité.

Pourtant jamais pareille somme d'héroïsme ne fut dépensée, de quel prix chaque gain de terrain n'est-il pas payé? Sans repos, sans trêve, jusqu'à l'épuisement complet, les troupes ter­rassent, veillent, attaquent.

 

Débarqué à Cuperly le 18 décembre, arrivé aux bivouacs de la 1e Division entre Somme-Suippe et Somme-Tourbe, le Régiment s'apprête, le 30 décembre, à soutenir une atta­que de la 33e Division; devant son insuccès, il revient can­tonner à Laval, retourne ensuite à ses emplacements sous les sapins de Somme-Tourbe, repart le 8 janvier en soutien d'une attaque prononcée à gauche. Le 21 janvier, le 1er ba­taillon va occuper les tranchées Brunes, le 2e bataillon vient prendre position le lendemain à la droite du 1er.

 

Dans ces tranchées célèbres, conquises naguère par le 17e Corps d'armée, encombrées de cadavres dont les corps amoncelés constituent parfois des parapets, la boue est un ennemi redoutable.

Les cas de pieds gelés sont nombreux.

L'espace compris entre Mesnil et Laval n'est, lui aussi, qu'un immense bourbier.

Pas d'abris, des tanières où l'on se couche à même sur le sol. Les abris Guérin ne valent guère mieux et Laval laisse même à ceux qui y ont passé le souvenir d'un caravansérail où toutes les armes s'entremêlent, où les hommes voisinent avec les chevaux, hésitant entre la terre détrempée et la paille pleine de vermine des cantonnements.

En ligne, les comptes rendus mentionnent quotidiennement de violents bombardements ou de longues fusillades presque toujours sans motif. Les canons-revolvers de l'ennemi nous causent des pertes sérieuses.

Jusqu'aux attaques, la vie était cependant supportable.

 

Le 3 février, une compagnie ennemie, partant des Bois-Jumeaux, attaque une section de la 7e compagnie commandée par le sous-lieutenant Evin. Sa belle attitude contraint l'assaillant à battre en retraite, laissant sur le terrain une quarantaine de morts et de blessés.

 

Le 7 février, la 5e compagnie, sous le commandement du capitaine Debacker, s'empare sans coup férir des Bois-Jumeaux. L'opération de grande envergure annoncée pour le 12 février est différée à cause du mauvais temps. Elle est reprise le 16 pour les 17e et 1e Corps d'armée.

Les bataillons sont massés suivant le dispositif prévu.

Le bataillon d'attaque (3e) est rassemblé dans la place d'armes à l'est du Bois Lorrain; il est appuyé par la 5e compagnie.

Le 1e bataillon occupe les tranchées et les hoyaux au sud du Bois Lorrain. Le 2e bataillon (troupe de tranchée), celles de première et de deuxième ligne.

A midi trente, le 3e bataillon, entraîné par le chef de bataillon David, a mis sac à terre; baïonnette au canon, sans tirer un coup de fusil, il s'élance à l'assaut et s'empare de toute la partie ouest des tranchées Blanches.

Le 1e bataillon (commandant Dujardin), descendant par les boyaux prononce son attaque sur la droite du 3e bataillon et se dirige rapidement sur la partie est des tranchées Blanches, dont il s'empare.

Le gain total est d'environ huit cents mètres de tranchées,

L'ennemi se ressaisit vite.

Le nombre de ses contre-attaques (trois le 16 février), toutes menées furieusement, indique sa volonté de reprendre ses positions.

 

Le 17, nous sommes contraints d'abandonner un peu de terrain.

 

Le 18, mêmes tentatives.

Il est du reste difficile de donner une idée d'ensemble de ces journées. La lutte se localise souvent dans les boyaux, où une escouade, parfois une section, résiste furieusement.

L'ennemi est très bien approvisionné en grenades. Jusqu'au 19, où les éléments de première ligne sont relevés par des éléments du 73e et du 127e, les tranchées, où les hommes s'entassent au coude à coude, sont furieusement bombardées.

 

Le 27 février, le 1e bataillon (bataillon d'attaque) et le 3e reviennent pour participer à une attaque des tranchées situées à l'est du Bois en Trapèze. Tout se réduit à une marche meurtrière dans les boyaux.

 

Dès le 5 mars, le Régiment est de retour dans la région de Laval-Wargemoulin.

 

Le 7 mars, la 4e Brigade doit prononcer une attaque brusquée sur la cote 196.

Les 2e et 3e compagnies s'élancent à la baïonnette, mais l'attaque n'ayant pas donné les résultats espérés est reprise à 17 h. 30; le gain est de 250 mètres de tranchées. Le lendemain, les 5e et 8e compagnies se portent à l'assaut du prolongement de la tranchée vers le fortin, s'en emparant, se fixent sur les positions conquises. Le 9, les 4e , 6e et 7e compagnies franchissent les parapets et, se portant en avant au pas gymnastique, tournent l'ouvrage à sa partie ouest et, à 16 heures, les derniers défenseurs se rendent (60 prisonniers du 2e régiment de la Garde); pour compléter cet avantage, les 2e et 4e compagnies s'emparent d'une tranchée au nord du fortin.

C'est après cette brillante opération, qui coûte d'ailleurs fort cher, que le général Chrétien, commandant la 11e Division, décida d'appeler le fortin « Fortin du 110e ».

 

Les jours suivants sont marqués par une nouvelle attaque des 6e et 7e compagnies (10 mars), des contre-attaques violentes (10 et 11), un bombardement incessant.

Le 13 mars, le Régiment est remplacé par des unités des 142e et 174e d'infanterie.

 

Après quelques jours de repos à Vertus, où le Général commandant en chef vient lui témoigner sa reconnaissance, le 110e s'embarque à Fère-Champenoise (28 mars).

Débarqué à Mussey près de Bar-le-Duc, il se rend par voie de terre près de Verdun, séjourne à Eix et, dans la nuit du 12 au 13 avril, relève les unités du 8e sur les positions des Eparges.

Aucune action d'infanterie pendant les journées du 13 au 17, mais la lutte de positions atteint sur cette crête des Eparges, conquise récemment par le 6e Corps, toute son âpreté.

Pendant quatre jours, le terrain est écrasé par l'artillerie allemande.

 

La menace prononcée au sud de Verdun par la Tranchée de Calonne fait revenir en toute hâte le Régiment de Cousances-aux-Bois à Mouilly, pour y relever le 132e (4 mai).

Le 3e bataillon occupe la gauche du secteur du Régiment, le 1e bataillon la droite, le 2e bataillon est en réserve. Les six jours passés sur ces positions qui défendent le village de Mouilly, appelées Côte de Senoux, offrent un caractère particulier.

L'ennemi, qui s'était avancé jusqu'à la route de Rupt-en-Woëvre, a été refoulé et s'est retranché dans les bois. Toute une organisation est à créer, mais les tentatives allemandes ne nous en laissent guère le loisir. Cependant jamais l'infanterie n'a été à pareille fête.

Malgré les arbres qui dissimulent. les assaillants, il se fait un beau massacre d'Allemands. La lutte se poursuit même souvent jusque sur le parapet, à la baïonnette. Une seule fois ils réussissent à enlever un de nos postes d'écoute et à s'emparer de deux mitrailleuses (5 mai); à partir de ce jour, ils ne peuvent obtenir le moindre avantage.

 

Dès le 5 mai, le lieutenant-colonel Buffet estime à plus de 700 le nombre de cadavres allemands qui se trouvent devant nos tranchées et qui appartiennent aux 36e et 48e régiments d'infanterie allemande.

Les contre-attaques ne cessent pas jusqu'au moment où le 110e est remplacé (nuit du 10 au 11 mai) par le 126e Régiment d'infanterie.

A ces quatre mois si remplis, si épuisants, va succéder une période plus calme.

Du 13 mai (où il remplace le 30e d'infanterie) au 20 avril (barré et corrigé manuellement: août), où il est remplacé par le 45e, le Régiment ne quitte pas le secteur de la Miette et du Choléra.

Suivant le rythme des saisons ou les péripéties des événements, les jours s'écoulent sans grands incidents. L'été apporte quelques adoucissements aux souffrances inévitables que comporte cette garde incessante.

L'ennemi est calme et son activité se manifeste surtout par l'envoi de bombes dans nos tranchées situées en avant du bois Carré, qu'il vise particulièrement. Les patrouilles se tapissent, des nuits entières dans les herbes hautes sans remarquer de préparatifs d'attaque.

L'humour même ne perd pas ses droits et si les Boches mettent un écriteau pour annoncer les premières défaites russes en Galicie, vite les cœurs fiers et des mains expertes remplacent le placard insolent par un drapeau tricolore.

Nos autos-canons viennent de temps à autre bombarder les tranchées ennemies, en ce cas la riposte ne tarde pas, le cimetière de la Pêcherie compte quelques tombes de plus; mais ces escarmouches quotidiennes ne sont que jeux d'enfant et la bonne humeur s'entretient entre les heures de veille et de travail dans les cagnas devenues plus résistantes et presque confortables.

 

Septembre se passe en travaux.

L'attaque de Champagne doit faire déclencher une attaque sur l'Aisne. En prévision de cette opération, tout le terrain compris entre le bois Blanc et la ferme du Choléra se transforme sous la pelle des travailleurs. Des équipes creusent des boyaux de communication, des sapes, font des emplacements d'artillerie, jettent des passerelles sur l'Aisne et le canal.

Un moment le secteur s'agite.

 

Le 26 septembre, un simulacre d'attaque est essayé au cri de « Baïonnette au canon! En avant ! » Comme il était prévu, l'ennemi garnit sa première ligne, qui est soumise à un feu meurtrier.

Les bataillons détachés au bois du Chauffour (groupe Guérin), le long de la route 44, au pied du fort de Brimont (1e-23 octobre), tiennent un secteur de tout repos.

Mais un deuil attriste cette période. Le lieutenant-colonel Buffet, blessé au cours d'une visite aux champs de bataille de Champagne, meurt des suites de ses blessures, le 21 octobre, à l'hôpital de Souain.

Son bon cœur, caché sous une apparence de rudesse, ses qualités guerrières lui avaient fait conquérir tous ses officiers et ses hommes. Un moment le Régiment passe sous le commandement du commandant Vergnes, que remplace le colonel Lechères, âme superbe de soldat.

On ne quitte un secteur que pour en reprendre immédiate-ment un autre.

 

Trois semaines passées à Sapigneul, pendant une relève du 201e (21 octobre-13 novembre) et le Régiment revient une fois encore aux environs de Pontavert remplacer le 34e d'infanterie.

Il tient d'abord les lignes en avant du bois des Buttes et de la Butte-de-l'Edmond, puis prend comme limite à gauche le moulin de Pontoy (route de Pontavert-Craonne) et à droite les marais de Ployon. Il faut que les hommes, dans cette plaine basse et dans le bois de Beau-Marais, se livrent à d'incessants travaux d'assèchement pour que les tranchées soient habitables.

Les territoriaux du 86e, qui partagent la garde du secteur, travaillent avec eux à l'établissement de pistes et de puisards.

L'artillerie n'est active que par intermittence, la nôtre s'acharne particulièrement sur Craonne, Chevreux.

 

Ainsi passe l'hiver pluvieux de 1915-1916, jusqu'au 11 février 1916, où le 231e vient prendre sa place. La longue période léthargique, mais active cependant de la guerre de tranchée, est close. L'attaque brusquée du 21 février sur Verdun la termine définitivement.

 

VERDUN (février-mars 1916)

 

Verdun et la Somme ne sont que deux épisodes du même drame, mais les rôles sont renversés.

L'assaillant de Verdun est à son tour attaqué en Picardie. Français et Allemands appliquent le même principe que la rupture du front n'est possible que grâce à un écrasement des positions adverses.

 

L'ennemi n'avait pas tenté d'opération de longue haleine depuis l'Yser, mais avec une patience inlassable il accumulait devant notre place forte de l'Est, sur la rive droite de la Meuse, un matériel considérable, massait ses meilleures troupes.

Son attaque se déclenche le 21 février, foudroyante. Il avance sur nos lignes pulvérisées, fait prisonniers les derniers défenseurs épargnés par le canon, s'empare des pièces d'artillerie.

Le 25, l'ennemi est parvenu aux dernières défenses de Verdun, au pied du fort de Douaumont, qui est une des clefs de Verdun. La situation est tragique.

 

Le Régiment, on l'a vu, avait été relevé le 11 février du bois de Beau-Marais. Il devait participer à une période d'instruction au camp de Léry-Lagery.

 

Dès le 21, il est rendu dans la région de Cumières et, le 25, il est enlevé par camions automobiles dans ses cantonnements de Charmont et de Saint-Mard-sur-le-Mont.

Après un trajet rendu extrêmement pénible par la neige et le froid, les 3e et 1e bataillons, débarqués aux portes de Verdun, passent la nuit du 25 au 26 à la caserne Marceau, et s'installent le 26 en formation préparatoire d'attaque dans le ravin à l'ouest de Fleury, face à Douaumont.

 

La relève du 95e R. I. ne peut se faire qu'à la nuit.

Le 1e bataillon ayant à sa gauche le 9e Zouaves occupe le terrain entre le Calvaire et le village de Douaumont exclus.

A droite, le 3e bataillon occupe la lisière nord du village de Douaumont et s'étend à droite jusqu'au pied du fort.

Le soir même, le 2e bataillon, qui vient de débarquer, et les trois compagnies de mitrailleuses sont mis à la disposition du Régiment.

Deux compagnies du 2e bataillon renforcent le 1e, dont le secteur est très étendu.

Les 6e et 7e compagnies restent à la disposition du commandant Debacker.

Dès ce moment on est aux prises avec les pires difficultés. L'ennemi, qui a un matériel formidable, écrase de nuit et de jour, avec les plus gros calibres, nos éléments de tranchée; aucune ligne de repli n'a été préparée, les hommes doivent se terrer dans des trous d'obus et creuser des abris individuels.

Encore le travail n'est-il possible que de nuit, les outils font défaut, on est réduit aux outils portatifs. Les liaisons n'existent ni entre les régiments, ni souvent entre les compagnies.

Beaucoup de coureurs sont tués au cours de leurs missions. Aucune défense accessoire ne protège l'accès de nos lignes, le temps épouvantable vient ajouter ses rigueurs. L'artillerie ennemie bombarde sans arrêt les routes, elle est servie par une aviation nombreuse et active, aussi le ravitaillement est-il difficile.

L'artillerie amie est très insuffisante, mais les 75 font merveille et tirent sans arrêt avec un crépitement de mitrailleuses.

Il est difficile d'établir une hiérarchie entre les différentes manifestations de courage, mais cette attente ferme devant l'ennemi et la mort, ce courage passif qui n'a pas l'adoucissement de l'action, est certainement une des formes les plus élevées de l'héroïsme.

Un violent bombardement le 27 et l'apparition de nombreuses colonnes ennemies descendant la cote 147 par le ravin au nord-ouest de Douaumont et par le bois de la Vauche font craindre une attaque qui ne se produit pas.

 

Le 28, le bombardement reprend de plus en plus violent, achevant de détruire le village de Douaumont et bouleversant le terrain à gauche de Douaumont.

Plusieurs sections de mitrailleuses sont mises hors d'usage par le bombardement. Nos pertes sont lourdes. On a vu comme la veille des colonnes d'infanterie s'infiltrer à l'est et à l'ouest de Douaumont par les bois; à 15 heures, l'attaque se déclenche, on distingue nettement de petites colonnes se faisant précéder de groupes de tirailleurs.

Les tranchées principalement visées sont celles qui sont occupées par la 7e compagnie; des tirailleurs arrivent jusqu'à proximité, se jettent dans les trous d'obus et envoient des grenades; mais les feux de la 8e compagnie (à gauche de la 7e) et les mitrailleuses du lieutenant Peuchot enrayent cette première attaque.

L'ennemi est contraint de battre en retraite en abandonnant de nombreux morts.

Un nouveau bombardement annonce une nouvelle attaque qui se produit à 16 heures. Bien que la 7e compagnie ait été renforcée par une demi-section, elle est entourée par l'ennemi qui a pénétré à droite et à gauche. Pour limiter l'avance de l'ennemi, la 4e compagnie à droite est renforcée et la 8e compagnie envoie un peloton.

Mais aucune troupe fraîche n'est disponible pour mener une contre-attaque.

Le lendemain, une compagnie du 73e, renforçant le 110e, tente sans succès cette opération.

L'ennemi travaille avec acharnement, sans attaquer, le 29, établissant des tranchées à contre-pente qui échappent à la surveillance des nôtres.

Le fort de Douaumont sur notre flanc droit est une menace perpétuelle, les engins qui y ont été apportés, canons-revolvers, mitrailleuses, prennent nos tranchées d'enfilade.

Les cadavres s'amoncellent, un vide, qu'on craint de voir utilisé, est creusé entre notre droite et la gauche des troupes à notre droite.

 

Le repos que l'on escomptait après la relève opérée dans la nuit du 1er au 2 mars par le 33e ne devait pas être de longue durée.

 

Le lendemain 2 mars, dans le bivouac au sud du fort de Souville, le Régiment est alerté pour aller porter secours à la 3e Brigade.

Sa mission est de se porter au nord de Fleury pour rétablir la liaison perdue entre le 33e R. I., au Calvaire, et le 9e Zouaves.

Différentes mesures sont prises pour empêcher tout mouvement de l'ennemi : les 1e et 3e bataillons, ayant le 2e en réserve, établissent durant le jour des tranchées sur le mouvement de terrain au nord de Douaumont, qui viennent se relier à celles des deux compagnies du 73e et des zouaves au sud de Douaumont; puis une compagnie du 1er bataillon et une du 3e se portent en avant, établissant la liaison entre le bataillon du 33e au Calvaire et les deux compagnies du 73e au sud du fort de Douaumont.

Enfin, à la tombée de la nuit, tout le 1er bataillon est porté sur les pentes sud-ouest de Douaumont pour établir solidement la liaison avec le 33e pendant l'attaque du 174e.

 

Les journées des 4 et 5 mars sont relativement calmes. On sent que l'ennemi, qui a fourni un gros effort, dont il n'a pas pu ou pas su exploiter les avantages, a besoin de souffler. Cette première offensive contre notre place forte de l'Est, qui symbolisait pour l'Allemand le foyer de notre résistance, a échoué devant l'abnégation et l'esprit de sacrifice de nos troupes.

Jamais plus il ne retrouvera l'heureux concours de circonstances que lui avaient donné ses succès du 21 février, jamais nous n'eûmes à nous trouver dans des conditions aussi défectueuses.

Dans les yeux des rescapés, qui le soir du 8 allongent leurs membres las sur la paille fraîche à la caserne Bevaux, se lit l'indicible fierté d'avoir sauvé Verdun.

 

LA SOMME

 

Rapidement, comme un corps sain mais qu'une forte effusion de sang aurait affaibli, le Régiment se remet en état de combattre.

Différentes unités lui envoient, à Vilotte-devant-Saint-Mihiel, des renforts : 113e, 64e, 81e, 142e, 36e, 155e.

Un chef venait de remplacer le colonel Lechères, dont la forte personnalité devait lui imprimer une ineffaçable empreinte, le lieutenant-colonel Lehagre, du 114e Bataillon de chasseurs. Le commandant Paillot venait de prendre en mains le 2e bataillon et c'est au complet qu'il embarque à Ligny-en-Barrois à destination de la Marne.

 

Du 2 au 11 avril, il cantonne dans la région de Dormans, puis se met en route pour relever le 123e Régiment d'infanterie dans la région de Moulins, au nord de l'Aisne.

 

Jusqu'au 24 juillet, date à laquelle il sera remplacé par le 63e R. I., il tient sans un moment de repos, aux pentes du plateau qui s'étend au nord de Troyon-Vendresse. L'ennemi, tapi dans ses tranchées et dont les positions dominent les nôtres, nous fait subir des pertes quotidiennes, dont le total avec les semaines finit par être imposant.

 

Plusieurs reconnaissances sont tentées dans les lignes ennemies les 20 mai, 1e et 30 juin.

Le sous-lieutenant Graeff se spécialise dans ce genre d'opérations. Mais la riposte de l'ennemi est meurtrière.

Verdun est toujours soumis à d'incessantes attaques de l'ennemi, dont la violence ne décroît pas. Le haut commandement allié prépare cependant une offensive sur la Somme.

 

Le Régiment s'embarque à Fismes, le 7 août, débarque à Conty, stationne dans la région de Molliens jusqu'au 26 août, portant au plus haut point par un entraînement méthodique ses qualités d'offensive.

 

Le 5 septembre, le 110e relève sur ses emplacements des éléments de la 3e Brigade, le 2e bataillon à Hardecourt, le 3e aux tranchées au nord de Maurepas et, enfin, le 1e dans la partie est. du bois de Maricourt.

Les journées suivantes sont mises à profit pour mettre la dernière main aux préparatifs d'attaque, creuser et aménager les tranchées, faire gagner aux bataillons leurs emplacements de combat.

Pour l'attaque, le dispositif réalisé est le suivant : 2e bataillon en première ligne (tranchées Savernack - bois Louage), 1e bataillon en réserve (tranchées Savernack et de Colmar), 3e bataillon en réserve de brigade.

Placé à gauche de la brigade, le Régiment devait s'emparer successivement des trois objectifs qui lui étaient assignés et dont le dernier était limité par le chemin du Cimetière de Rancourt.

A l'heure H (12h. 30), le 2e bataillon, entraîné par le commandant Paillot, se porte superbement en quatre vagues successives à l'assaut des lignes ennemies.

Mais à peine sont-elles sorties qu'elles sont arrêtées par des feux de mitrailleuses partant de la haie artificielle du carrefour, un peu au nord de La Maisonnette. La droite a pu cependant un peu progresser jusqu'à la tranchée boche, en faisant des prisonniers.

Le bataillon est dès ce moment dans l'impossibilité d'avancer, pris sous un violent barrage d'artillerie et des coups de mitrailleuses de front et d'enfilade; mais le terrain conquis est conservé.

Pendant cette attaque le bataillon Perrot (1e bataillon) était venu occuper les tranchées de départ du 2e bataillon, le 3e bataillon (bataillon Séguin) s'installait à la tranchée Savernack et à la lisière sud du bois Louage. Le gain de cette journée pourtant si dure était insignifiant.

 

Les jours suivants voient se développer une série d'opérations qui doivent amener d'abord l'investissement progressif de Combles, puis son occupation.

Les 13, 14 et 15, le 110e avec le 73e constituent, à la gauche de la division, la brigade Duplessy.

L'attaque sur le carrefour de La Maisonnette est reprise le 13 par le bataillon Perrot, appuyé du bataillon Séguin (3e); arrêté une première fois par les feux de mitrailleuses, il s'élance à 17 heures, atteignant la haie artificielle qui est dépassée.

Mais le carrefour des routes Combles - Maurepas, Combles - Leforest est toujours occupé et retarde notre avance. En attendant les moyens nécessaires pour réduire la résistance ennemie, le terrain conquis est organisé solidement.

 

Une nouvelle répartition des unités remet le 15 septembre le 110e, relevé par le 1e Régiment d'infanterie, à la disposition du colonel commandant la 4e Brigade. Le Régiment appuie le 33e d'infanterie, qui borde la route Bapaume - Péronne.

 

On emploie les 16, 17, 18, 19, 20 septembre à la construction de boyaux devant faciliter l'attaque prévue sur Rancourt. Les tranchées du Trentin, occupées par le 3e bataillon, de l'Hôpital (1e bataillon), la lisière sud du bois d'Anderlu sont soumises à un tir incessant d'obus de tous calibres.

Le mauvais temps vient accroître les difficultés et rendre plus pénible encore le séjour dans ce terrain bouleversé.

 

Le 20, le Régiment reprend ses emplacements du 15; les événements vont se précipiter.

 

Le 21, une reconnaissance avait constaté que l'ennemi exécutait des travaux aux environs de La Maisonnette. Un coup de main est exécuté sur cet emplacement, le 22, par la 3e compagnie, soutenue par la 1e.

Les Allemands, qui se défendaient dans la tranchée boche et dans La Maisonnette, sont passés par les armes. La ligne est même portée à 400 mètres au nord de La Maisonnette.

Le résultat de cette opération, menée par le capitaine Mottez, était de 150 prisonniers du 74e R. I., dont 3 officiers.

L'étreinte menée autour de Combles se resserre chaque jour. Il est de plus en plus évident que l'ennemi ne pourra conserver longtemps ce village autrefois riant et dont on aperçoit les maisons mutilées à travers les arbres.

Les contre-attaques déclenchées par l'ennemi le 23 et le 24 sont sans effet, sinon sans énergie. L'ennemi s'arrête à contre-pente à environ 150 mètres de notre ligne et s'organise.

 

En revanche la possession du carrefour 138 est fortement disputée, le 25 septembre, au 3e bataillon et au 43e d'infanterie.

Une série de mesures de détail nous permettent d'entrer le 26 dans Combles, presque complètement évacué par l'ennemi, mais qui avait subi de lourdes pertes, ainsi qu'en témoignait le nombre des cadavres et des blessés.

Dès 5 heures, la 10e compagnie s'installait dans le groupe de maisons situées à la lisière sud-est de Combles. La 2e compagnie, au même moment, pénétrait dans une tranchée à la lisière sud. La compagnie allemande à qui avait été confiée la garde du village se rendait (150 prisonniers, 2 officiers). Pendant que la 10e compagnie nettoie toute la partie est du village, le 2e bataillon se porte à la lisière nord-est.

Il s'élève parfois, sous forme de contestation amicale et sans aucun soupçon de rivalité, des controverses pour savoir qui est arrivé le premier sur l'objectif. Il faut reconnaître qu'au moment où le 2e bataillon, renseigné par une reconnaissance du lieutenant Peuchot et entraîné par le commandant Paillot se précipite tout entier dans Combles, seule une reconnaissance du 3e bataillon (adjudant Miserolle) l'avait précédé. Les derniers défenseurs sont capturés, ainsi qu'un matériel considérable dans les abris qui avoisinent la gare.

Les morts du 12 septembre sont vengés !

La prise de cette importante bourgade était la récompense d'une longue série d'efforts. Cinq cents prisonniers restaient entre nos mains.

La fatigue des hommes était extrême : le 1er bataillon dut cependant remplacer pendant quarante-huit heures, jusqu'à l'arrivée du 350e d'infanterie, le London Regiment, sur la route Morval - Combles.

 

Le 29, les trois bataillons sont échelonnés en profondeur, du bois Louage à la tranchée des Fous, derrière le 8e qui doit attaquer la tranchée des Portes-de-Fer.

 

Mais ce n'est que le 6 octobre que le Régiment est remplacé par le 77e Régiment d'infanterie; il s'embarque en camions à la ferme Bronfay, pour gagner de là Conty, d'où il se dirigera vers la Champagne.

 

Trente jours de combats presque ininterrompus n'ont point entamé sa résistance; malgré l'épreuve du 12 septembre il sent sa supériorité sur l'ennemi, cinq régiments allemands lui ont fait face pendant ce mois d'attaques. La reprise, mais à quel prix, de quelques kilomètres du sol de France lui donne la sensation de préparer la délivrance du pays, qui devait tarder si longtemps encore.

 

LA JOURNÉE DU 16 AVRIL 1917

 

De la dernière quinzaine d'octobre 1916 à la fin de février 1917, le Régiment avait, sauf une période de repos aux abords du Camp de Mailly, tenu le secteur au nord de Mesnil-les-Hurlus.

Dans ces plaines monotones et maintenant désertes, on ne reconnaissait plus l'enfer de 1915. Point d'action d'ensemble pendant ces quatre mois, mais l'héroïsme constant, obscur, quotidien, les interminables heures de garde dans les nuits glaciales, les patrouilles dans le terrain défoncé, entre les lignes, la garde des entonnoirs.

La faction finie, il fallait refaire les tranchées dont la craie s'éboulait par le gel, patauger pendant des kilomètres pour aller aux cuisines marocaines chercher les vivres. Les bataillons en réserve au Camp Madelin n'y trouvaient qu'un abri incommode.

 

Seules les journées des 15 et 16 février rompirent le calme relatif du secteur.

Dans l'après-midi du 15, très peu de temps après le retour d'une patrouille conduite par le sous-lieutenant Terre, qui ramenait trois prisonniers du 238e d'infanterie allemande, un bombardement d'une violence inouïe se déclenchait à droite du Régiment, sur le quartier du 208e à Beauséjour.

Les 2e et 1e bataillons, qui tenaient les premières lignes, recevaient quelques éclatements, tandis que le 3e (commandant Eliet) se portait à travers les tirs de barrage, prêt à une contre-attaque qui, du reste, fut différée, sur les croupes qui portent Maisons-de-Champagne.

 

Le 28 février, tous les éléments du 110e avaient cédé la place au 126e et le Régiment se rendait par étapes dans la région de l'Aisne. Dans les marches qui le ramenaient de Champagne en Tardenois, un immense souffle d'espoir gonflait tous les cœurs.

On savait que de grands événements se préparaient, on était fier d'y participer et personne ne doutait que la victoire, cette fois, ne dut nous sourire.... On se retrouvait en pays connu.

Les bords de l'Aisne, aux environs de Pontavert, n'étaient-ils pas nôtres par droit de conquête ? Beaumarais, aux taillis autrefois solitaires et silencieux, était maintenant une ruche active, fiévreuse. Au pied de l'Éperon de Craonne, sentinelle menaçante, la place d'honneur nous était assignée.

 

Dès la nuit du 8 au 9 avril, le 2e bataillon était monté en ligne en avant du bois de Beaumarais, remplaçant le 1e bataillon du 33e; les 1e et 3e bataillons restaient .employés aux travaux, le 3e dans la région de Beurieux, le 1er aux environs de Concevreux et de Meurival.

 

Ceux-ci ne vinrent prendre position que dans la nuit du 15 au 16 avril, qui devait précéder l'attaque.

Les trois bataillons étaient échelonnés en profondeur dans l'ordre suivant, chaque bataillon devant avoir deux compagnies en première ligne et une en réserve : 1e bataillon (commandant Perrot), ligne Oran - Nemours (1e, 3e, 2e); 2e bataillon (commandant Paillot), parallèle route de Chevreux (6e, 5e, 7e); 3e bataillon (commandant Eliet), tranchée d'Anspach (9e, 10e, 11e).

L'heure de l'attaque arrivée (6 heures), d'un seul élan les trois bataillons s'élancent: puis, sur la plaine, les compagnies se fractionnent en lignes d'escouades par un, comme à la manœuvre et franchissent lentement nos réseaux où les brèches sont trop étroites. Pendant les premières minutes, c'est un silence impressionnant que troublent seulement quelques éclatements de 77 et de 105. L'ennemi aurait-il abandonné ses tranchées qu'on aperçoit devant soi : tranchées de la Plaine, d'Enver-Pacha et de l'Enclume?

Mais arrivés devant les fils de fer intacts qui les défendent, les premiers groupes sont fauchés par des mitrailleuses qui se dévoilent. Les avions boches, eux aussi, tiennent l'air et mitraillent les assaillants.

Moment angoissant ! Faut-il déjà s'arrêter ? La gauche (1e compagnie et 1e compagnie de mitrailleuses) est arrêtée; les hommes cherchent dans un trou d'obus un abri précaire, les vagues suivantes s'entassent dans les parallèles de départ. La droite, cependant (3e compagnie), à 7 h. 45, parvient par l'est du bois en Bonnet-Persan, à s'installer dans la tranchée d'Enver-Pacha et fait une cinquantaine de prisonniers.

Il n'est pas, dans l'histoire du 110e d'heures plus douloureuses que celles qui suivirent.

 

Cette journée du 16 avril qui, dès le début, dans ce secteur, apparaît comme un insuccès, est interminable. La rage d'avoir été cloué sur place, le sentiment d'impuissance devant ces fils de fer, la vue des divisions de droite et de gauche qui, plus heureuses, avancent au delà du bois des Buttes et occupent un moment Craonne torturent les cœurs autant que les tirs de barrage et les rafales de mitrailleuses. Lever la tête au-dessus de son trou d'obus ou de la parallèle où l'on est terré, c'est s'exposer à une mort presque certaine. Cependant, dédaigneux, indifférents aux balles et aux obus, le capitaine Malteste, le lieutenant Peuchot vont et viennent le long des parapets, encourageant les hommes, attentifs à tous les mouvements de l'ennemi.

Les batteries ennemies tonnent sans répit sur les hauteurs de Craonne.

En avant de la ferme du Temple flambent les grands tanks immobilisés.

Ce régiment, qui s'était élancé, d'un seul bloc, pour rompre le front adverse, n'est plus qu'une poussière d'hommes éparpillés dans la plaine. La nuit suivante, les unités se regroupèrent, reprirent cohésion et pendant trois journées encore défendirent âprement, leurs positions, appuyant les efforts du 27e Bataillon de chasseurs, qui reprenait à son compte l'attaque sur la gauche.

L'insuccès ne décourage et n'abat que les faibles; les forts, au contraire, se raidissent dans l'adversité, y puisent une raison de persévérer, sachant que la victoire n'est pas un cadeau du destin, mais le résultat de l'effort longtemps poursuivi.

 

REPOS   Avril-juillet 1917

 

Les cœurs étaient toujours aussi fermes, mais les corps avaient besoin de repos.

Le Régiment repassait la Marne le 23 avril, près de Dormans, et se rendait par étapes aux pays de l'« arrière », si souvent évoqués dans les moments pénibles et dont le seul souvenir alors ragaillardissait. Les environs de Montmirail (Montdauphin, Montenils, Montolivet), ceux de Ramerupt, la région de Provins, autant de haltes bienfaisantes et réparatrices.

Après le travail du matin, commencé dès l'aube, on goûtait l'ombre de l'après-midi sous les arbres.

Car on travaillait ferme, mais avec allégresse : le printemps était dans toute sa fleur. Le métier demande d'incessants perfectionnements; il faut s'adapter aux nouveautés de l'armement, sans cesse exercer son œil, entretenir la souplesse de ses membres, aviver son intelligence, l'habituer à utiliser tous les avantages du terrain.

Chacun s'ingéniait à mettre aussi dans son humble tâche de chaque jour un peu de cette activité fière et crâne, coquetterie à laquelle tenait tant le lieutenant-colonel.

 

LES FLANDRES juillet-décembre 1917

 

Dans la nuit du 19 au 20 juillet, le 1e bataillon, devançant le Régiment s'embarquait à Provins à destination de Bergues. A Bergues et à Dunkerque, la population civile s'efforçait de retrouver dans ces soldats casqués des figures d'autrefois entrevues à Jean-Bart, Guilleminot ou Leclerc.

Dans le lointain du souvenir, cette période des Flandres (juillet-décembre 1917) apparaît comme une de celles dont on aime le plus volontiers à se souvenir.

Le coup de collier donné, on venait goûter à Pitgam un plein repos; on renouait les habitudes du précédent séjour, des visages connus vous accueillaient, on donnait des fêtes.

De temps en temps, les grands chefs venaient dire la haute estime dans laquelle ils tenaient le Régiment (revue du Généralissime, 6 octobre). Le 2e bataillon, mis à la disposition du Général gouverneur de Dunkerque, s'en fut même ‑ avantage apprécié ‑ cantonner dans les faubourgs de la ville.

Enfin, les permissions étaient libéralement accordées et beaucoup retrouvaient même, plusieurs fois par semaine, leurs foyers et leurs champs.

Le séjour en ligne en dehors des journées d'attaques était pénible.

 

Dans les plaines des Flandres aucun obstacle n'arrêtait les gaz que l'ennemi prodiguait. Dès son premier séjour en ligne (22-28 juillet), le 1e bataillon avait eu à souffrir des premiers obus à ypérite. L'artillerie ennemie était active et, la nuit principalement, battait routes et pistes.

Son aviation causait des pertes : le 19 août, vers 17 heures, apparut dans le ciel la célèbre escadrille qui symbolisait par la peinture sanglante de ses ailes ses sinistres exploits.

La nature était hostile, les bosquets riants de Westvleteren et de Crombeke, les champs de blé qui s'étendaient jusqu'à Eckoeck, tout ce décor paisible contrastait singulièrement avec le sol dévasté qui, quelques kilomètres plus loin, bordait le canal de l'Yser, un terrain qu'on ne pouvait fouiller, une terre que la moindre pluie transformait en marécage. Les obus pénétraient profondément et creusaient des cratères vite remplis d'eau.

 

L'attaque du 31 juillet, menée par la 1e Division, avait donné un gain de terrain appréciable. Il s'agissait non de poursuivre cette opération pour atteindre des buts lointains, mais de donner à nos troupes des positions solides.

Le 6 août, le 3e bataillon recevait l'ordre de s'emparer du groupe d'abris et de blockhaus connu sous le nom d'ensemble des « Lilas »; malgré les efforts de la 9e compagnie (à gauche en liaison avec le 127e) et de la 10e compagnie (à droite en liaison avec le 208e), qui plusieurs fois s'élancèrent à l'attaque, l'objectif ne put être atteint.

 

Le lendemain, le 1e bataillon, plus heureux et favorisé par une préparation d'artillerie plus précise, s'emparait sans perte des Lilas.

 

Le 9 Octobre, c'est le 2e bataillon qui, aidé du 3e, mène l'attaque, le 3e en liaison avec la 51e division. Quant au 1e bataillon, il s'échelonnait en réserve à hauteur des fermes André Smits et Camélia.

Deux compagnies par bataillon étaient en ligne (2e : 5e et 7e ; 3e : 10e et 9e).

Les pluies avaient gonflé le Stenbeck, mince ruisseau en temps ordinaire; son passage offrait de grandes difficultés, quelques passerelles avaient été jetées par les pionniers du régiment et le génie, mais leur nombre était trop réduit et leur faible visibilité firent qu'elles ne furent presque pas utilisées. Les hommes entrèrent franchement dans l'eau jusqu'au ventre.

L'objectif final devait être atteint en trois bonds. Le premier bond nous avait donné la tranchée du Laminoir et d'anciens emplacements de batterie, et nous avait permis de faire une cinquantaine de prisonniers. D'un deuxième élan, la ferme de la Victoire fut enlevée.

A 8 h. 55 la progression reprenait et la ferme de Papegoede était emportée, sa garnison (50 hommes, 2 officiers et 3 mitrailleuses) restait entre nos mains.

Les fermes de la Victoire et de Papegoede étaient de solides abris en béton armé, véritables forteresses que les plus gros obus entamaient sans toujours les détruire.

L'ennemi fit tout pour les reprendre.

A 10 h. 30, une contre-attaque venant de Draibank réussit à nous arracher la ferme de la Victoire, à son tour la ferme de Papegoede retombe aux mains de l'ennemi.

C'est à la 6e compagnie (sous-lieutenant Cardon) que revient l'honneur de reprendre, par un coup hardi, la ferme de la Victoire. La 7e compagnie, sous la conduite du capitaine Fontenay, s'empare de Papegoede, le 10 octobre, à 4 h. 30. Tous nos objectifs étaient atteints le 10, à 5 heures du matin.

Octobre se termina et novembre se passa en partie en travaux. L'assaut terminé, on troquait la grenade offensive contre la pelle et la pioche; on construisait des voies ferrées. En remontant en ligne jusqu'aux premiers jours de décembre et jusqu'à la relève par l'armée belge, on aménageait le terrain conquis et I'on rendait praticables ces vastes terrains déformés et envahis par l'eau.

 

Les journées du 16 et 17 août, celle du 9 octobre sont parmi les plus belles du Régiment. Elles sont une revanche éclatante du 16 avril.

Elles font montre des plus belles qualités : ardeur dans l'attaque, élan que n'arrêtent pas les pires difficultés du terrain, acharnement extrême à prendre et à reprendre ce qu'on a gagné. Beaux faits d'armes isolés qui demanderaient, pour être productifs, à être placés dans un vaste ensemble; somme énorme d'héroïsme qu'on regrette de voir se diluer ainsi.

C'est que les vieilles formules triomphent encore; l'invincible puissance du canon, du canon lourd, a été proclamée : l'artillerie déblaie le terrain et l'infanterie occupe le sol ainsi bouleversé; l'avance est une série de bonds successifs, tous soigneusement préparés par un déluge de munitions.

Vienne la preuve que cette conception est trop restreinte et l'infanterie reprendra ses qualités et son rôle : elle deviendra mobile et manœuvrière.

 

 

  

L'AUBE DE LA VICTOIRE : L’OURCQ janvier-juillet 1918

 

C'est aux environs de Senlis que s'ouvrit la nouvelle année.

Que donnerait cette année 1918 ? Tous avaient conscience que la tâche serait dure. La défection de la Russie commençait pour l'adversaire à porter ses fruits. Il fallait, jusqu'à ce que l'aide américaine fût devenue efficace, contenir l'ennemi.

Les circonstances obligeaient donc les Alliés à revenir à une stricte défensive. Il fallait mettre le front en état de défense avant que fussent accumulées de l'autre côté tous les moyens d'attaque. A l'abri de tranchées solides, suffisamment hérissées de fils de fer, toute attaque ne devait-elle pas s'émousser et finalement échouer? C'était le moyen de remédier à l'infériorité momentanée en hommes et en matériel.

La IVe armée, à la disposition de laquelle était mise la 2e Division, avait des positions naturelles puissantes, mais insuffisamment. organisées pour parer à une attaque qui, sans aucun doute, serait formidable. Le secteur entre Oise et Aisne, traversé par l'Ailette et abandonné par Hindenburg au moment de son repli, ne comprenait qu'une seule ligne de retranchements d'une solidité précaire.

 

Du 19 janvier au 17 février, le Régiment pose des réseaux, creuse des boyaux et des tranchées, construit des abris le long du canal de l'Oise à l'Aisne et sur les crêtes qui portent, face à Coucy-le-Château, les villages de Crécy-au-Mont et de Lœuilly. Cette deuxième position terminée, la ligne des réduits est entamée aux environs de Bagneux.

 

Le même travail est entrepris sur les crêtes au sud de I'Aisne, du 14 février au 23 mars, d'abord dans le secteur compris entre Presles, Boves et Maizy, puis plus à l'est.

Les blés qui verdissent dans les champs de Glennes, Meurival, Conceveux et Roucy se creusent en un système puissant établi pour permettre la plus grande économie des forces.

Chaque jour augmente la confiance des travailleurs dans les défenses qu'ils établissent. Mais des tranchées sans défenseurs ne sont qu'un obstacle illusoire.

On ne tarda pas à en faire la preuve douloureuse.

 

Les jours d'épreuve étaient venus.

L'ennemi attaque le 21 mars, en direction Amiens et Montdidier, et, dès le premier jour, obtient des résultats impressionnants. Le Régiment est sous les armes, prêt à aller combattre au premier rang. Mais il monte remplacer dans le secteur de la Ville-aux-Bois la 162e Division qui, elle, s'embarque en camions.

Huit jours de ligne qui inaugurent une période d'incessantes alertes. L'adversaire, supérieur en nombre, prêt à renouveler à chaque instant sur un autre point du front la surprise qui lui a si bien réussi, tient nos troupes sur les dents. Il faut se porter aux points les plus menacés, être prêts à la parade.

La Division est une Division d'élite; on la place aux endroits où il est à craindre qu'une brèche soit ouverte; mais comme autrefois la Garde, on ne l'engagera qu'à la dernière extrémité.

Successivement le Régiment revient aux environs de Sois-sons, à Juvigny et Villers-la-Fosse, pour aider par des travaux de nuit et appuyer par son concours le repli de la 151e Division sous Coucy-le-Château. Puis il se porte aux bords de l'Oise, à Plessis-Brion et Montmacq, où l'ennemi, devant Noyon — à Ribécourt et au Mont Renaud — est toujours menaçant; de là dans la région de Beauvais et dans celle d'Abancourt (Feuquières), par crainte d'une nouvelle attaque en direction de la mer, à moins que la raison de ce déplacement ne soit un projet de contre-offensive.

 

Le 27 mai, au Chemin-des-Dames, le Kronprinz obtient un nouvel effet de surprise. Les positions de la rive droite sont emportées en une journée; celles de la rive gauche ne peuvent être maintenues. Le flot dépasse la Vesle, s'étend jusque la Marne.

Il faut à tout prix limiter cette nouvelle invasion, sauver Paris, le cœur de la France.

 

Le 26, le Régiment s'embarque en camions à Feuquières; le 30, il est mis à la disposition du Général commandant le 1e Corps d'armée dans la région de Courtieux - Montigny - Lengrain.

 

Le 31, dans le ravin de Cutry, il s'apprête à soutenir la 35e Division. On vit dans cette journée les mitrailleurs s'atteler aux voiturettes et les remorquer sous un soleil de plomb, à travers champs et en suivant pas à pas la progression.L'ennemi, contenu au sud de l'Aisne, esquisse une menace au sud-ouest, vers la forêt de Retz; la situation est si critique qu'il faut à tout instant changer de positions.

 

Enfin, le 2 juin, l'ordre est donné de se porter dans la région d'Autheuil-en-Valois pour y appuyer une contre-attaque de la 3e Division de cavalerie, laquelle, fort éprouvée, sera relevée après cette opération.

Le moment d'intervenir est venu. Mais cette intervention n'est pas encore celle qu'on avait souhaitée. C'est un retour à une guerre de tranchées, mais rudimentaire, une guerre à la mode de 1914.

Aux bords de l'Ourcq, sur les flancs de l'ennemi, imprudemment avancé, à l'endroit où la vague a été endiguée, on creuse des trous individuels où les hommes se tapissent sous un couvert de seigle et blé vert, car tout mouvement de jour est impossible.

La nuit, les patrouilles sortent, il faut sonder les intentions de l'ennemi, prévenir un retour offensif toujours possible.

On développe davantage les défenses dans les lignes de réserve et de soutien. La troupe ne prévoit pas encore que ce plateau de Mosloy sera le tremplin d'où elle s'élancera, le jour de la riposte.

Mais le commandement lui fait exécuter une série d'opérations de détail, la conduit comme un cheval devant l'obstacle, aux positions de départ les plus favorables.

Si brillantes que soient ces opérations menées par un bataillon (29 juin, 3e bataillon), ces incursions dans les lignes ennemies tentées par des sections, leur éclat disparaît dans les rayonnements des journées qui suivirent.

Elles sont une manière de chef-d’œuvre collectif, le début d'une série ininterrompue de victoires, dont l'ensemble nous a donné la Victoire.

 

Le Régiment, du 18 au 26, y prend une part magnifique. Il a un guide, le général Mignot, dont la pensée claire et froide dans la conception est servie par une volonté inflexible. Il a un chef qui l'entraîne, le lieutenant-colonel Paillot, prodigue de sa personne, toujours aux endroits les plus périlleux.

Pour qui sort des hautes frondaisons de la forêt de Villers-Cotterets, le pays situé sur la rive gauche de l'Ourcq, qui fait transition entre I'Île-de-France et le Tardenois, présente un contraste singulier. Les bois deviennent plus rares, de vastes plateaux agricoles s'étendent du nord au sud, leur altitude varie entre 100 et 16o mètres.

Les affluents de l'Ourcq (Wadon, Rû, Garnier) y ont creusé de profondes coupures. Sans doute ce terrain se prête à la défense et l'ennemi en utilisera tous les mouvements; il se tapira dans les blés mûrs, y installera ses groupes de combat et ses nids de mitrailleuses.

Mais le temps et les moyens pour s'organiser lui ont fait défaut. Il ne pourra que tenter de se défendre pied à pied, retardant parfois notre avance, sans la contenir jamais. Et quelle satisfaction pour les nôtres d'échapper à l'obsession des tranchées, de mettre en action toutes les armes dont il dispose, de combattre au grand soleil et sur un terrain praticable.

C'est une course de vitesse entre les divisions, la 2e ne laisse à aucune des divisions voisines le triomphe d'atteindre la première les buts assignés. A plusieurs reprises, par suite de l'arrêt des 33e et 63e Divisions, elle devra stationner pour que ses flancs ne soient pas dégarnis. Il faut aller de l'avant, frapper des coups répétés. L'histoire d'un régiment ne se sépare pas de celle des régiments qui « travaillent avec lui », on ne lutte plus isolément. Chaque jour, dans l'aube encore indécise, des milliers d'hommes partent à l'assaut; ils recommencent jusqu'à ce que l'objectif soit atteint. Les bataillons se relaient aux premières vagues; mais la tâche est aussi rude, le marmitage aussi violent en seconde et en troisième vague.

Il est impossible d'entrer dans le détail de ces huit journées, mais deux caractéristiques s'en dégagent, la première c'est que les conditions nouvelles du combat permettent aux chefs de bataillon, aux commandants de compagnie, aux chefs de section même, la plus large initiative.

 

Le 18 juillet, dès l'aube (4 h. 35), le 3e bataillon, en tête du Régiment, s'élance à la poursuite du barrage roulant qui a remplacé la longue préparation d'artillerie; il rencontre une résistance dans Passy-en-Valois, masquant l'obstacle par une compagnie, il le déborde par le nord, atteignant à 5 h. 10 son premier objectif.

A 6 h. 5, l'assaut reprend le village de Montrou est âprement défendu; tandis que la 9e compagnie, à droite, atteint son deuxième objectif, la 10e est arrêtée devant Montrou; une section de la 11e compagnie comble le vide qui se forme entre les deux compagnies.

Puis le bois Allongé est abordé par le nord, la lisière Est est atteinte par la 9e compagnie, mais une violente contre-attaque la refoule jusqu'à la lisière ouest.

A 15 h. 30, le 2e bataillon dépasse le 3e et, sous les ordres du capitaine Malteste, remplaçant le chef d'escadrons de Rodellec, blessé la veille, s'empare de la totalité du bois Allongé, atteignant ainsi le second objectif, mais il ne peut déboucher et la situation reste la même jusqu'au lendemain.

 

Le 19, c'est le 1e bataillon (chef de bataillon Mirou) qui prend la tête.

A 4 h. 20, il part pour passer devant les deux autres bataillons et se porter à l'attaque de Neuilly-Saint-Front. L'ennemi, ressaisi, ne parvient ni par son barrage, ni par ses avions qui mitraillent à faible hauteur et lancent des torpillettes, à briser son élan. Arrêté devant Neuilly par la nécessité de regrouper ses compagnies et surtout par un tir mal réglé de notre artillerie lourde, il attend jusqu'à 11 h. 20 le moment d'attaquer le bourg par un vaste mouvement débordant par le nord. La voie ferrée et le faubourg du Mont sont rapidement enlevés, la cote 127 atteinte. Aussitôt reformé, il atteint en partie son deuxième objectif; mais l'arrêt du 8e R. I. devant. Maubry ne permet pas à la compagnie Lagouche (2e) d'atteindre la cote 154.

Le second trait à noter, c'est l'intime union entre les régiments.

 

Le 20, le 1er bataillon, en soutien du 8e, couvre ses flancs menacés par l'ennemi entre Neuilly-Saint-Front et le ruisseau du Wadon. Même mission pour le 1er bataillon encore le 21; la 63e D. I. étant en retrait sur le 8e, le commandant Mirou comble cet intervalle avec une compagnie, les deux autres s'apprêtent à défendre coûte que coûte le château de Montigny et le village de La Croix.

 

La progression du 8e est lente les 22 et 23, le 2e bataillon couvre ses flancs à gauche du bois des Allouettes. Enfin, sous une nouvelle poussée, le 24, en direction de Fère-en-Tardenois, l'ennemi se retire jusqu'à Coincy et se maintient derrière la voie ferrée; on voit ce jour-là le général Mignot, à cheval, communiquer à tous sa confiance.

 

Les 25 et 26, le 208e, gardé sur ses flancs par les bataillons Mirou et Malteste, tente sans grands résultats de progresser vers Bruyères; il est même renforcé par l'intervention directe de la 2e compagnie.

 

La citation obtenue par le Régiment dit éloquemment, dans sa concision, les résultats obtenus.

 

L'ennemi, surpris au 18 juillet, subit une pression qui va s'aggravant sans cesse; il lutte avec I'énergie du désespoir pour permettre le repli vers le nord de ses armées aventurées dans la poche de Château-Thierry.

Il sacrifie ses plus intrépides mitrailleurs, l'élite de ses fantassins, l'usure de ses forces devient irrémédiable.

La Victoire, longtemps indécise, apparaît sur l'immense champ de bataille, imprécise encore, mais certaine.

 

L'AILETTE

 

Quinze jours de demi-repos aux environs de Candelu et de Retheuil, puis sur les bords de l'Aisne, à Trosly-Breuil, suffisent au Régiment pour se remettre sur pied, combler ses vides, assimiler ses renforts, l'esprit y est si puissant que dès le premier contact les nouveaux venus, d'où qu'ils viennent, s'amalgament et ne songent qu'à égaler leurs aînés. A la tête des sections se trouve une pléiade de jeunes sous-lieutenants qui ont fait leurs preuves aux derniers combats.

 

A côté des chefs connus pour leur bravoure et expérimentés, le capitaine Briaud venait de prendre le commandement du 2e bataillon : il avait déjà conquis tous les cœurs ; au cours des journées du 20 au 31 septembre, il allait se révéler comme le guide en qui on a toute confiance, qu'on suit aveuglément.... Mais le moment n'est pas encore venu de se reposer sur des lauriers.

Malgré la résistance de l'ennemi qui, chaque jour, s'exaspère, tantôt l'une, tantôt l'autre de nos armées l'attaque et le harcèle. A tout instant la bataille reprend sur un nouveau point de l'immense champ de bataille.

De l'armée Degoutte (6e), la division passait à l'armée Mangin (10e). Les hommes savent que ce rude manieur d'armées est redoutable pour l'ennemi qui ne peut plus se dégager une fois pris dans son étreinte. Le 19 août, le Régiment est à pied d'œuvre sur la rive droite de l'Aisne, aux environs de Bitry.

L'ennemi, tâté par la 128e Division et désireux de nous voir perdre nos efforts et gaspiller en pure perte sur un terrain abandonné nos munitions, s'est retiré au delà d'Autrèches et de Massenancourt.

 

Le 19 août, dans la nuit, les 2e (à gauche) et 3e (à droite) bataillons descendent les pentes qui conduisent à Vassens pour gagner leurs bases de départ qui est sensiblement la route Vassens-Morsain.

La nuit avait été extrêmement dure. Sous un tir violent d'artillerie et de minenwerfer, où les obus à gaz sont prodigués, les compagnies se placent aux lisières nord-est de Vassens, s'abritant des éclats d'obus par des pans de mur. Cette fois, l'ennemi ne pourra alléguer la surprise; il s'attend à l'attaque, sa vigilance est entière; de temps en temps on entend, tout proche, le claquement d'une mitrailleuse.

A 7 h. 10, les bataillons partent à l'attaque; le terrain est escarpé et boisé, et si l'artillerie ennemie n'a pas le temps d'avancer son barrage, des pentes sur lesquelles est bâti le château de la Roche, les mitrailleuses déversent une pluie de halles.

On voit les servants à leur poste, ne s'enfuir qu'au moment où les nôtres arrivent sur leurs pièces. Quelques cadavres feldgrau, dans la cour du château, témoignent de la défense opiniâtre des défenseurs; mais la plupart se sont réfugiés dans la creute Kakadu.

Un caporal se présente à l'entrée, fait signe aux occupants d'avoir à se rendre; il est abattu d'un coup de fusil à bout portant. Une mitrailleuse servie par un sergent est mise immédiatement en batterie et tient les occupants en respect jusqu'à l'arrivée d'une section de lance-flammes. La panique la plus comique se peint sur tous les visages; suivant l'attitude classique, les bras levés et criant « kamarades » de toute la force de leurs poumons, 150 Allemands quittent la grotte et gagnent l'arrière à toutes jambes.

Cet incident réglé, le bataillon se remet en marche sur le plateau. Il a déjà dépassé l'Arbre de Vassens quand, sur ses flancs, complètement dégarnis par l'arrêt de la 55e Division, des tirs de mitrailleuses le prennent d'écharpe et une contre-attaque se dessine. Un peloton de la 6e compagnie (sous-lieutenant. Long) revient sur ses pas et fait tomber cette résistance par la capture de plus de 200 prisonniers.

L'attaque, cependant, se ralentit; vers 10 heures le bataillon parvient à reprendre pied dans la tranchée de Tilsitt, à cheval sur la route de Vassens à Selens (5e compagnie à gauche, 6e et 7e compagnies à droite). Mais la tranchée de Tein et le carrefour 160 sont encore fortement tenus, et, à plusieurs reprises, l'ennemi paraît vouloir revenir à la charge. Le 3e bataillon est arrivé sur le même alignement, prolongeant le 2e sur la droite; mais ce n'est que dans la nuit que le 246e peut se mettre en liaison à gauche avec la 5e compagnie.

Le butin (le cette première journée est magnifique : 800 prisonniers, 5 canons, 6 mortiers de 240, 5 minenwerfer légers, 100 mitrailleuses demeurent entre nos mains. Les conséquences de cette première opération ne tardent pas à se faire sentir.

 

Si le lendemain 21 le 208e ne réalise qu'une progression peu importante, en revanche, le 22, talonné par le 208e, qui appuie le 110e, l'ennemi « décolle », abandonnant une large portion de terrain avec la ferme du Crocq, Selens, les Bourguignons et la ferme Bonnemaison. Sa tactique est donc d'arrêter notre avance de façon à pouvoir établir une ligne de résistance sur laquelle il se retirera en limitant ses pertes; la nôtre est d'empêcher la constitution de ces lignes et, comme le détail est subordonné au plan d'ensemble de la bataille, de l'amener à déplacer fréquemment ses renforts, de créer des points faibles.

Aussi, pas un instant les objectifs assignés ne sont-ils perdus de vue, la lutte se poursuit avec une opiniâtreté tenace. Installé dans le système d'organisations établi en janvier par la division, l'adversaire nous contient le 23, de 5 heures à 17 heures; mais sur une nouvelle poussée du 208e et des 1e et 3e bataillons du 110e, il cède à nouveau, abandonnant la tranchée Brunehaut et permettant aux compagnies de tête de s'installer sur le plateau de Malhôtel, à quelques centaines de mètres de la route Crécy au Mont-Juvigny.

 

Sur ce plateau de Malhôtel, le Régiment tient deux jours et trois nuits, subissant de terribles bombardements, se cramponnant au sol et tentant à nouveau de progresser dès qu'une contre-attaque ennemie est enrayée. La journée du 24 n'est marquée que par une tentative de progression vers Crécy-au-Mont du 1e bataillon (à gauche) et du 2e (à droite), qui a remplacé le 3e; mais celle du 25 est certainement une des plus dures que le Régiment ait vécues.

Complètement aventuré en flèche, exposé au feu des batteries qui, cachées dans la basse forêt de Coucy, écrasent le plateau; attaqué par la 1e Division de la Garde, il ne cède un peu de terrain que contraint par le nombre et sans laisser compromettre la situation générale.

La nuit avait été calme; mais au matin, à 4 h. 20, un barrage violent décelait une attaque très prochaine. Elle se produisait à 5 h. 25. Sac au dos, l'ennemi avance résolument vers nos tranchées; mais les mitrailleuses, fusils-mitrailleurs et fusiliers du 2e bataillon l'arrêtent par leur tir. Toutefois, à gauche, il gagne un peu de terrain (1e bataillon).

La 3e compagnie, qui a déjà fait plus de cent prisonniers, se trouve encerclée.

 

Dès lors l'ennemi ne cesse de harceler la gauche et tâche de s'infiltrer dans nos lignes; la situation demeure angoissante toute la journée; à vingt reprises, le commandant Mirou demande des renforts qui ne peuvent lui être envoyés en nombre suffisant.

L'attaque que nous déclenchons à 10h50 ne donne pas de résultat. L'ennemi, de son côté, renouvelle, à la faveur d'un nouveau barrage, ses tentatives sur la gauche. Le capitaine Lagouche, avec deux sections, résiste jusqu'à la dernière extrémité mais succombe sous le nombre. Dans les P. C. de bataillon, tout le personnel disponible, coureurs, observateurs, cyclistes, s'apprête à résister pour sauver le ravin de Malhôtel.

Enfin, à 21 heures, l'attaque est définitivement enrayée et le Régiment relevé dans le courant de la nuit par le 335e Régiment d'infanterie.

 

On passe le 26 août dans les tranchées qui avoisinent la ferme Loire.

Un nouvel effort est demandé aux hommes, fatigués sans doute, mais prêts à répondre à tout appel.

 

Le 27, le 3e bataillon remplace à Pont-Saint-Mard un bataillon du 8e, le 2e bataillon se place derrière, le 20, sur les traces duquel il doit franchir le canal et l'Ailette; puis, faisant face à droite, s'emparer de la ferme Nogentel; à ce moment une tête de pont étant établie, le 3e bataillon franchira l'Ailette et coopérera à la prise de Coucy-le-Château. Mais les tentatives du 20e R. I. échouent et ce n'est que le 30, dans la soirée, que la ferme Nogentel et Bains-des-Dames sont enlevés par ce régiment, tandis qu'à droite, de ce côté-ci de l'Ailette, la cote 124 et le Haricot-de-Malhôtel sont toujours aux mains de l'ennemi.

 

Dans la seconde partie de la nuit du 30 au 31, le Régiment, maintenant échelonné en profondeur derrière Pont-Saint-Mard, est remplacé par le 80e.

C'est la dernière opération de grande envergure entreprise par le Régiment. Si le gain de terrain est moindre que celui obtenu en juillet, en revanche le nombre des prisonniers et des canons capturés témoigne de l'acharnement. de l'ennemi à défendre ses positions.

Malgré son mordant et sa ténacité, la Garde prussienne n'obtient qu'un succès éphémère en disproportion absolue avec les pertes qu'il lui a coûtées.

 

 

LA VICTOIRE septembre-novembre 1915

 

 

Une fois de plus le Régiment revient du combat amputé de quelques membres, mais enrichi d'une gloire nouvelle et fier de son œuvre.

La Division s'embarque à Pont-Sainte-Maxence à destination de l'Alsace pour y relever une Division qu'elle rendra disponible pour la bataille.

Dès le 15 septembre, deux bataillons sont en ligne en avant de Guevenheim et de Soppe-le-Bas. Bien des fois les regards s'étaient tournés, pendant quatre années, vers ce coin d'Alsace reconquise où la guerre ne connaissait pas les âpres mêlées.

 

En fait, jusqu'à la fin d'octobre, on y goûte, dans l'automne qui dore les forêts et les vergers, un peu de la joie de vivre au sortir de la rude tension nerveuse des deux derniers mois.

Si les compagnies en ligne sont toujours sous la menace d'une incursion ennemie que facilite le peu de densité des troupes, en revanche celles qui cantonnent à Soppe et Guevenheim peuvent se refaire. Et les bataillons qui se succèdent à La Chapelle-sous-Rougemont y trouvent confort et bien-être. Cependant on s'entretient la main en patrouillant le long de la Doller et dans le No man's land qui s'étend devant Pont-d'Aspach et Burnhaupt.

Chaque jour apporte clans ce coin d'Alsace si calme un nouveau bulletin de victoire. Les grandes villes du Nord sont dégagées; l'ennemi, chassé pied à pied, débarrasse de son odieuse présence la plus grande partie de la France envahie; il est repoussé sur la Meuse.

Il faudra bientôt reprendre sa place dans la bataille, aussi l'ordre de départ est-il accueilli sans surprise.

 

Le 26, le Régiment est remplacé par le 206e.

Ce retour d'Alsace en Lorraine par Belfort, Lure, Luxeuil, Plombières, Mirecourt est presque déjà une marche triomphale, car la Victoire s'affirme de plus en plus.

De l'Éperon de Vaudémont qui domine la plaine lorraine où une partie du Régiment cantonne les 9 et 10 novembre, on apercevrait, sans la brume de novembre, et Tantonville, où le général Mangin vient d'installer son quartier général, et l'immense fourmillement de troupes qui s'apprêtent à attaquer le front ennemi.

Les moyens rassemblés sont formidables. De vingt à trente divisions éprouvées, connues pour leur mordant, sont massées pour l'attaque. Mais déjà l'ennemi, conscient de sa défaite, ne veut pas, en prolongeant sa résistance, la transformer en un désastre irréparable et le lendemain, dans les cantonnements de Lemainville, Ormes, Gerbécourt et Haroué, où flotte encore le souvenir de Bassompierre, un message capté par T. S. F. apprend que l'armistice est signé et que les hostilités sont suspendues le jour même, à 11 heures.

 

La joie ressentie à cette nouvelle est grave et austère : satisfaction de bons ouvriers qui, ayant rempli jusqu'au bout leur tâche longue et pénible, vont pouvoir, enfin, se reposer. Et puis l'on se retourne non pour regretter les souffrances endurées, puisqu'elles sont le prix auquel a été acheté la Victoire, mais pour déplorer que ne soient pas présents à l'heure du triomphe, tous ceux qui ont été les compagnons de lutte et de misère, mais qui ne sont plus désignés à l'attention des passants que par un tertre et une croix portant avec leur nom le numéro du régiment. Dans le cadre trop vaste de ce trop rapide exposé, les faits seuls qui ont leur éloquence ont parlé, et l'on s'accuse comme d'une involontaire injustice de voir sacrifiées dans l'immensité du drame et devant la grandeur des résultats tant de personnalités dont le rôle a été efficace et héroïque.

Eux-mêmes nous auraient déconseillé l'attendrissement. Il vaut mieux cueillir dans la vie et dans celle des survivants quelques leçons d'héroïsme. Loin de nous, d'ailleurs, l'idée de vouloir juger les grands chefs, les conducteurs d'unités. L'Histoire dira un jour la part qui leur revient dans l'élaboration de la Victoire. Mais c'est une fierté que tous ressentent d'avoir servi sous des généraux dont les seuls noms sont déjà une garantie de bravoure et de science militaire.

Leurs noms ont déjà franchi les barrières de la renommée : Brulard, Guignabaudet, Mignot, Pétain, Doyen, Lévi, Roubert.

Chacun des colonels du Régiment a eu la bonne fortune de demeurer suffisamment de temps pour lui donner la marque distinctive de sa personnalité, toutes ses empreintes se complètent, sans se contrarier et ont fait du 110e cette unité merveilleuse que le lieutenant-colonel Paillot a eu le bonheur de conduire à la victoire.

 

Chaque bataillon, chaque compagnie, chaque escouade a ses héros. Il en est de tels qui passent mais laissent un souvenir ineffaçable, témoins le commandant Garceau qui, à Mesnil, « travaille », prend des croquis sur le parapet et dont l'ardeur, malgré la soixantaine passée, égale celle des plus jeunes. Témoins encore tous ces capitaines du début, fauchés presque tous pendant les attaques de Mesnil, Podvin, Marteau, Odienne, Martin, Vautrin, Duquesnay, Riquier. Il en est d'autres qui, plus heureux, accompagnent le Régiment dans toutes les péripéties de la lutte et s'imposent, fières figures de soldats, à l'admiration de tous : les Malteste, Peuchot, Lagouche, Logez, Destouches. Il faudrait les citer tous, et si ces noms viennent tout de suite au souvenir et aux lèvres des survivants, c'est qu'ils sont comme les symboles vivants du Régiment.

 

Chacun fait superbement son devoir à quelque endroit que le sort ou ses fonctions l'aient placé. Le sentiment qu'aucun blessé ne demeurait sur le terrain était, au moment de l'attaque, une force et un stimulant pour tous. Sous la haute et compétente direction du médecin-chef Garcin, d'admirables équipes, menées par les médecins de bataillon, fouillaient les champs de bataille. Ces figures, comme celle du médecin Villard, étaient légendaires au Régiment. Tous, téléphonistes aussi bien que grenadiers, pionniers (sous la conduite du lieutenant Depont) comme mitrailleurs, apportaient à l'œuvre commune une abnégation complète et un entier esprit de sacrifice.

 

Cette guerre, qui met aux prises des millions d'hommes et où chaque combattant ne voit qu'une infime partie de la bataille, impose à la Gloire un rigoureux anonymat. Chacun, cependant, n'a qu'à rentrer en lui-même pour trouver des actes dont la notoriété n'a pas dépassé le cercle restreint de l'escouade ou de la section et qui, en des temps moins féconds, auraient défrayé les chroniques. C'est à Crécy-au-Mont que quelques hommes, sous la conduite du sous-lieutenant Rouquette et du caporal Bussolin, tiennent pendant deux jours (24 et 25 août) un barrage constamment attaqué par l'ennemi; à Coincy, qu'un sergent mitrailleur va mettre en batterie une pièce, en plein jour, à moins de dix mètres d'un groupe de mitrailleurs allemands.

Devant Passy-en-Valois, le sergent Sénéchal (7e), avec six hommes, réduit deux mitrailleuses lourdes servies par six Allemands; le même Sénéchal, pendant les combats de l'Aisne, parcourt, les lignes, sans souci des projectiles, pour se maintenir en liaison avec les chasseurs.

C'est un sergent mitrailleur (Cousin, 3e C. M.) qui, par son énergie, sauve la situation et arrête une contre-attaque ennemie devant Montrou.

Certains faits tiennent du roman. Devant Montrou égale-ment, le mitrailleur Moreau voyant deux pièces de 77 prêtes à faire feu, bondit en avant, oblige le sous-officier d'artillerie à se rendre, capture deux soldats, puis abat à coups de mousqueton l'officier qui tente de regrouper son personnel, s'emparant ainsi de deux autres pièces.

Le soldat Vauquier (1e compagnie, à Neuilly-Saint-Front, s'avance en avant de nos lignes pour identifier les hommes qu'on aperçoit à quelque distance. Reconnaissant des ennemis, il revient sur ses pas, avertit ses camarades et, comme ils hésitent, leur crie : « Tirez! mais tirez donc! » et il se couche tandis que sifflent les balles, qui, heureusement, l'épargnent. On multiplierait facilement les anecdotes, mais la preuve est faite de la vaillance des hommes, les victoires du Régiment la prouvent éloquemment.

 

Tout soldat, a-t-on dit avec un peu d'ironie pense que son régiment est le plus beau et le plus valeureux de France, il n'est pas un soldat du 110e, soyez-en sûr, qui pense autrement. Ce n'est pas par vantardise, vanité ou dédain de ce qui fut fait par d'autres, mais fierté de l'œuvre commune, conscience des liens qui les attachent à nos compagnons de souffrance et aux lieux où nous avons beaucoup peiné, conscience aussi d'avoir enrichi son individualité au contact de l'âme de cette famille, si unie dans la joie comme dans le malheur, qu'est un régiment.

 

 

EN PAYS CONQUIS

 

Ce ne sera certainement pas un des moindres titres de fierté du 110e que d'avoir été appelé parmi les premiers à porter ses armes sur le Rhin.

En lui confiant cette mission, les chefs ont voulu récompenser sa vaillance jamais démentie. De Haroué à Lemainville, où nous l'avons quitté au moment de l'armistice, traversé Nancy, l'ancienne ville de Stanislas Leczinski, qui a supporté vaillamment tous les outrages de l'ennemi et est maintenant frémissante d'allégresse. L'ancien système de tranchées est franchi le 18 novembre au bord de la Seille et les petits villages de Tragny, Thémonville et Flocourt, les premiers de Lorraine désannexée, où le Régiment cantonne, manifestant avec une simplicité touchante la fidélité de ceux qui ont attendu pendant quarante-huit ans le retour de nos troupes. L'accueil enthousiaste de la population, la langue française parlée avec l'accent particulier à cette contrée, des sentiments de loyauté et de franchise si peu germains témoignent mieux que toutes les controverses historiques combien sous l'oppression allemande cette région est demeurée attachée à la France.

Pour qui sait l'histoire, quelle étape émouvante à travers la Lorraine! Le 27, le 2e bataillon, sur les derrières de l'ennemi qui se retire, va non loin de Sarrelouis, — la ville de Louis XIV, fortifiée par Vauban, — cantonner à Dillingen, sur la rive droite de la Saare. A partir de ce jour, on entre en Allemagne, et le peuple, qui s'attendait à être soumis au traitement dont ses soldats avaient accablé nos régions occupées, est tout surpris de voir ses vainqueurs respectueux de ses droits et de ses coutumes.

En face de la désagrégation qui dans les derniers mois de 1918 avait travaillé l'armée allemande et précipité sa défaite, l'attitude impeccable de nos troupes suscite l'admiration, et les habitants commencent à comprendre qu'il existe une autre race de soldats que celle qui était façonnée par l'inflexible et cruelle discipline allemande:

Empruntant tantôt le territoire de la province rhénane, tantôt celui du Palatinat bavarois, le 110e, par la vallée de la Nahe, s'approche du grand fleuve français; il attend quelques jours à Finthein avant de faire son entrée solennelle à Mayence.

C'est le 14 décembre, le ciel est bas et couvert, comme il convient à une entrée triomphale qui est en même temps une fête du souvenir. Le Régiment, par files de huit, s'est massé devant la gare principale et au pas joyeux des musiques, précédées par des cavaliers porteurs d'oriflammes, il s'avance devant la haie des curieux jusqu'à la Hofghens, où se tient à cheval un des grands artisans de la victoire, le général Fayolle; à côté de lui, les généraux Gouraud et Mangin. C'est une minute d'enthousiasme contenu, mais violent; il semble que la Patrie ait envoyé par ses chefs connus et aimés son salut de reconnaissance à tous ceux dont l'effort continu nous a permis .d'atteindre le Rhin, qu'on voit rouler majestueusement et qui est franchi au pont de Kastel; la troupe a besoin d'exprimer sa joie et pousse un triple et retentissant hourra.

Dans la proclamation qu'on va Iire, où un chef a laissé parler son cœur, les émotions de cette journée grandiose sont très heureusement traduites.

 

ORDRE DE LA DIVISION

 

Au moment où vient de se réaliser le rêve de ma vie : passer triomphalement le Rhin allemand comme nos glorieux ancêtres, à la tète des troupes françaises et victorieuses, je veux vous dire, nies Camarades, combien l'émotion a serré mon cœur et voilé mes yeux.

Cette impression, vous l'avez tous ressentie !

A voir s'avancer, dans un défilé inoubliable, vos bataillons serrés; à voir flotter au vent, au milieu de la masse impressionnante de vos baïonnettes, fanions, étendards et drapeaux, on sentait vibrer en plein territoire ennemi l'âme même de la Patrie.

Fantassins, artilleurs, vous avez été magnifiques.

Vous êtes dignes de la France et de la 2e Division.

Je me glorifie d'avoir traversé Mayence à votre tête, et c'est à vous que je dois la plus grande fierté de mon cœur de soldat. Je vous dis merci et bravo.

Vive la 2e Division !

 

Le Général MIGNOT, commandant la 2e Division :

Signé : MIGNOT.

 

 

Tandis que le Régiment s'avance jusqu'aux avant-postes destinés à maintenir l'intégrité de la tête de pont de Mayence et monter une garde pacifique, mais vigilante, dans la montagne boisée du Taunus, à Niederjosbach, Idstein et Hefftrich, le Général en chef des armées françaises vient remettre au Drapeau du Régiment, à Wiesbaden, la glorieuse fourragère aux couleurs de la Médaille militaire (20 décembre).

Sur la place du Rathaus, à l'architecture grave et un peu compassée, un bataillon du 8e Régiment et un escadron du 19e Dragons rendent les honneurs. Assisté du général Fayolle, des généraux Lacapelle (commandant le 1er C. A.), Lecomte (33e C. A.) et Mignot, le maréchal Pétain écouta la lecture des citations du Régiment, faites par un officier d'état-major, puis épingla la fourragère aux plis du Drapeau qui flottait déjà à Zurich et Hoenlinden.

En termes émus, il a rappelé les heures critiques où il avait le commandement de la 4e Brigade. Le lieutenant-colonel Paillot, portant lui-même le glorieux emblème, répliqua: « Nous en sommes tous fiers, Monsieur le Maréchal ». « C'est moi qui suis fier de vous », répondit le maréchal.

 

Du 15 janvier au 8 février, le Régiment en entier cantonne à Wiesbaden, citée bâtie pour le repos et l'amusement d'une foule cosmopolite; elle offre à nos soldats, qui si longtemps ont été privés, confort et distractions.

Sans anticiper sur l'avenir, on peut affirmer que l'occupation a déjà eu pour résultat — les témoignages et les preuves en sont nombreuses, et on les trouve jusque dans les journaux allemands — de faire apprécier à sa juste valeur notre peuple si longtemps dénigré par nos ennemis, de regagner à la France les sympathies qu'elle s'était acquises autrefois sur la rive du Rhin et à Mayence. Dans la lutte qui s'est engagée entre la civilisation latine et la civilisation germanique, dont la guerre actuelle est l'épisode le plus sanglant, il est à prévoir que la suprématie restera à la première, qui symbolise en face de l'affreuse idolâtrie de la violence, le goût de la mesure et la culture véritable.

Comme les Légions romaines apportaient dans les lieux les plus reculés la civilisation latine, le 110e, sentinelle avancée en Germanie, a pris à tâche de manifester les plus nobles qualités françaises, pour la sauvegarde desquelles tant des siens sont tombés.

 

 

CITATIONS OBTENUES PAR LE RÉGIMENT

 

 

Le Général commandant la 5e Armée cite à l'ordre de l'Armée le 110e Régiment d'infanterie :

«         Au contact de l'ennemi pendant trente jours, a constamment    suivi l'impulsion de ses chefs, le colonel Lévi, commandant la Brigade, et le colonel Buffet, commandant le Régiment; s'est ainsi avancé jusqu'au pied des retranchements ennemis contre lesquels il a mené une attaque vigoureuse ».

Le 23 octobre 1914.

Le Général commandant la 5e Armée,

Signé : FRANCHET D'ESPEREY

 

 

Le Général commandant la 6e Armée cite à l'ordre de l'armée le 110e Régiment d'infanterie :

« Le 110e Régiment d'infanterie, sous l'ardente impulsion de  son chef, le lieutenant-colonel Lehagre, s'est emparé dans une série de combats, menés sans interruption du 12 au 25 septembre 1916, de tout un ensemble de points d'appui fortement organisés; dans la nuit du 25 au 26 septembre, a parachevé l'encerclement de la position ennemie et s'est emparé de toute la partie sud-est, faisant preuve jusqu'au bout, malgré les pertes subies, d'un        mordant et d'une vigueur admirables.

« A fait 770 prisonniers et capturé un matériel de guerre considérable ».

Le 21 octobre 1916.

Le Général commandant la 6e Armée,

Signé: FAYOLLE.

 

 

Le Général commandant la 1e Armée cite à l'ordre de l'Armée le 110e Régiment d'infanterie :

«         Régiment d'élite, fidèle à son glorieux passé, qui a participé joyeusement à l'offensive du 9 octobre 1917. Sous les ordres de son chef, le lieutenant-colonel Rollet, a établi en quelques instants, sous le feu de l'ennemi, des passages de fortune sur un ruisseau très marécageux qui le séparait de celui-ci et qui constituait un obstacle très sérieux dès sa base de départ. S'est emparé de tous ses objectifs, réduisant à la grenade de nombreux points de résistance énergiquement défendus. S'est cramponné sur le terrain conquis qu'il a rapidement organisé malgré de furieuses contre-attaques de l'ennemi. A capturé 4 officiers, 200 prisonniers, 14 mitrailleuses, 3 canons de tranchée et un nombreux matériel ».

Le 8 décembre 1917.

Le Général commandant la 1e Armée :

Signé : ANTHOINE.

 

Le Général commandant la 6e Armée cite à l'ordre de l'Armée le 110e Régiment d'infanterie :

« Régiment au brillant passé. Lancé dans la bataille défensive de fin mai 1918, a puissamment contribué à l'arrêt de l'ennemi; n'a cessé de le harceler dans un secteur défensif très actif, lui reprenant des positions importantes. Puis, malgré les fatigues causées par deux mois de luttes continues, a pris une part des plus brillantes, sous le commandement du lieutenant-colonel Paillot, à l'offensive du 18 au 25 juillet; s'est emparé de tous ses objectifs (trois villages, dont une localité importante), âprement défendus pied à pied par un ennemi tenace. A fait une avance de 21 kilomètres en profondeur, capturant 234 prisonniers, 21 canons, 6 mitrailleuses avec un très nombreux matériel ».

Le 9 septembre 1918.

Le Général commandant la 6e Armée,

Signé : DEGOUTTE

 

 

Le Général commandant la 10e Armée cite à l'ordre de l'Armée le 110e Régiment d'infanterie :

« Régiment d'élite qui vient de prouver une fois de plus son ardeur offensive, son endurance et sa vigoureuse ténacité. Sous le commandement du lieutenant-colonel Paillot, du 20 au 31 août 1918, a pris part à la bataille; s'est élancé à l'attaque de positions redoutables, les a enlevées, refoulant l'ennemi à 12 kilomètres, capturant à lui seul plus de 800 prisonniers, 11 canons, 130 mitrailleuses, et malgré les fatigues accablantes, après quatre jours de combats acharnés, a brisé net les attaques de la 1e Division de la Garde prussienne, que l'ennemi avait été contraint d'amener à la hâte pour enrayer la marche victorieuse de la 2e Division ».

Le 9 décembre 1918

Le Général commandant la 10e Armée,

Signé : MANGIN.


 

 

LISTE

des Officiers, Sous-Officiers, Caporaux et Soldats

du 110e Régiment d’Infanterie

ayant obtenu une Citation à l’Ordre de l’Armée

 

(disponible sur demande)

 

 

LISTE

des Sous-Officiers, Caporaux et Soldats

du 110e Régiment d’Infanterie

morts pour la France

(disponible sur demande)

 

--------o--o---O---o--o---------

 

Voir le carnet de guerre du soldat Amédée MUYLS du 110e RI : 

Dunkerque, la retraite, La Marne  à son ensevelissement par bombardement en 1915

 

 

 

Retour accueil                retour page précédente